Brunch et chutes de Montmorency

Dimanche 30 octobre, je me réveille chez mon hôtesse Stéphanie, à Beauport, un quartier résidentiel de la ville de Québec. Ce matin, elle organise un brunch pour sa famille venue de Gaspésie. Au menu : pain doré (pain perdu en québécois), fruits frais, sirop d'érables, toasts, oeufs au bacon, pommes de terre sautées, haricots au lard. Ici on mélange sans complexe le sucré et le salé et j'ai vu plusieurs fois des gens verser le sirop directement sur le bacon ou les pommes de terre. Je ne vais pas jusque là mais, pour une française, je suis très ouverte d'esprit sur la question et ce petit déjeuner est pour moi un vrai régal ! Je découvre aussi une nouvelle boisson : le mimosas. Sur quelques centilitres de mousseux, on se verse un verre de jus d'orange. Le résultat est frais et pétillant, peu alcoolisé et tout à fait agréable, un vrai apéritif du matin. Je profite aussi du repas pour discuter avec la famille. Leur accent est assez prononcé mais ne m’empêche pas de comprendre et je pense qu'ils font un effort quand ils s'adressent à moi directement.  La Gaspésie est une région du "Québec profond" bien loin de la grande métropole qu'est Montréal. La ville d'où ils viennent est à 800 kilomètres au nord de Québec, dans un endroit où les montagnes tombent directement dans la mer. Si c'est une magnifique région, elle souffre de dépeuplement ayant perdu son industrie et n'étant plus capable d'offrir à sa jeunesse un avenir à la hauteur de ses espérance.

Plus tard, la famille part "magasiner" et il ne reste que Stéphanie et sa mère. Je pars seule dans les rues de Beauport pour visiter les chutes de Montmorency. Beauport est comme une ville de banlieue et n'a plus rien à voir avec le vieux Québec. Les maisons sont déposées les unes à côté des autres, toujours entourées de petits jardins. Les styles sont assez hétérogènes et colorés. On trouve les marques typiques de l'Amérique du nord avec les corniches et balcons à colonnes romaines et les lames de bois ou de pvc qui recouvrent les murs. Après 10 minutes, on arrive à l'entrée du parc où se situent les chutes. On y arrive par en haut : face à une large falaise, comme un affaissement du terrain où se jette la rivière. Les chutes font 83 mètres de hauteur et même si après l'Islande, il est difficile d'être impressionné, ça reste un beau spectacle. On longe la falaise sur une promenade en bois puis on traverse la rivière juste au dessus de la chute. De là, on peut prendre un chemin qui remonte la rivière vers l'intérieur de la forêt.  Nous sommes plus au nord que Montréal et les feuilles sont presque toutes tombées, elles forment un tapis coloré au sol et un parfum d’automne embaume. Entre deux branches nues, on peut voir sauter un écureuil.

Je retourne vers les chutes et retrouve Stéphanie et sa mère qui m'ont rejoint. On peut descendre en bas de la falaise par un escalier de 487 marches. Stéphanie l'utilise pour "s'entrainer", c’est ce qu'elle fait aujourd'hui en descendant et remontant 8 fois de suite... Personnellement, je ne fais que descendre puis longe ensuite le lac qui se forme en bas des chutes pour rejoindre le petit téléphérique qui permet de remonter.  L'hiver, les chutes ne gèlent pas mais le lac oui et elles sont entourées de glace. Au pied de la falaise se forme alors un "pain de sucre", comme une colline de glace sur laquelle les gens viennent glisser. Stéphanie vient, elle, pour faire de l'escalade sur glace. Je me contenterai de la vision d'automne, très belle, elle aussi.

Nous retournons à Beauport et c'est la fin de mon très court séjour à Québec. Stéphanie me dépose à la gare routière et je reprends le bus pour Montréal mais je ne regrette pas cette petite virée d'un week-end qui m'a permis d'avoir un aperçu un peu plus large du Québec...

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Québec en un jour

Je prends le bus à Montréal le samedi matin à 10h. Nous traversons le Saint-Laurent, la ville apparaît dans toute sa splendeur. Puis voilà les rues monotones de la banlieue de Longueuil et enfin la longue autoroute  qui nous mène à Québec.  Nous traversons des champs et des forêts, plus nous montons vers le nord et moins les arbres ont de feuilles. Bientôt les seules couleurs viennent des sapins verts et dorés. Entre lecture et sommeil, les trois heures de trajet sont vite passées et me voilà déposée à la gare centrale de Québec.

Au premier coup d'oeil, la ville n'est pas si différente bien que le bâtiment de la gare nous donne déjà un aperçu. Mais je m'avance vers le vieux Québec et je suis accueillie par les remparts. J'arrive rue Saint-Jean : ici, pas de hauts building mais un centre ville à l'européenne avec de jolies maisons de pierre. Je marche jusqu'à la rue Couillard et je m'installe pour déjeuner dans un petit café chaleureux. De là, je repars bientôt et monte vers l'hôtel de ville. De longues rues descendent du centre vers les remparts et nous offrent la vue sur les grandes plaines alentour. Je monte jusqu'à la basilique puis jusqu'au château Frontensac. C'est un bien étrange bâtiment : on ne peut pas vraiment dire qu'il ait un style européen mais il ne ressemble à rien de ce qu'on voit ailleurs en Amérique. On le croirait sortie d'un conte de fée avec ses hautes tours rondes et son air bavarois. C'est en fait un hôtel de luxe qui date du XIXème siècle mais qui fait aussi du patrimoine historique du vieux Québec, lui apportant ce charme si particulier. Au pied du château,  on peut flâner sur de grandes terrasses en bois qui dominent le Saint-Laurent avant de descendre le grand escalier qui mène à la ville basse.

Ici, on n'est plus du tout en Amérique et on se croirait dans une ville médiévale française. Les maisons sont en grosse pierre blanche et le sol est pavé. J'admire la rue du petit-Champlain que tout le monde vient voir. Car non, je ne suis pas la seule à visiter Québec. Et d'ailleurs, bien que je trouve la ville très jolie, je ressens un petit côté "Mont Saint-Michel" quand je me promène : un lieu comme figé dans son histoire et qui est plus un musée qu'une véritable ville. Me voilà Place Royale et c'est seulement en entrant dans l'église Notre-Dame des Victoires que je prends conscience de l'age récent de la ville. Là où, en Europe, on aurait trouvé une petite chapelle romane, on a ici un pur style néo classique avec ses colonnades et ses dorures.

Je monte doucement la rue Saint-Pierre, ralentie par les multiples galeries d'art qui foisonnent un peu partout. Enfin, j'entre dans le musée des civilisations. Il est déjà 16h, et je n'ai qu'une heure si je veux visiter le musée. Je prends tout de même un billet et ne visite qu'une seule des nombreuses sections, celle qui m'intéresse le plus : l'histoire du Québec. Cela complète un peu ce que j'ai lu à Montréal et me permet de mieux comprendre cette région que je connais si mal. Je lis l'histoire des premiers colons, la conquête des anglais, les lutes pour la liberté et l’indépendance, les révoltes qui n'ont pas abouties... L'histoire nous amène jusqu'au XXème et nous présente le Québec actuel, sa mixité et son identité. J'ai remarqué que l'esprit identitaire au Québec était très différent ce qu'on trouve en France, il arrive à s'affirmer sans rejeter les nouvelles cultures qui le forme, et je trouve que l'on devrait s'en inspirer.

Le musée ferme et je reprend mon chemin. Mon dos me fait encore souffrir le froid est tenace. Je remonte doucement vers la gare routière. C'est là bas que vient me chercher Stéphanie, rencontrée par Couch surfing et qui sera mon hôte ce soir. Elle habite à Beauport, assez loin du centre et ma visite de la ville s'arrête ici. Je n'ai vu qu'un rapide aperçu, un tour à peine esquissé. Pour vraiment connaître Québec, il me faudrait visiter le reste : les parties de la ville où les gens vivent et pas seulement son joli coeur figé.

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Cafés, restaurants, Halloween

Comme je l'avais prévu, je n'ai pas eu beaucoup le temps de visiter lors de cette première semaine à Montréal. Surtout que j'ai été parasitée d'abord par un rhume puis par un mal de dos qui m'ont littéralement handicapée. Mais j'ai décidé d'ignorer au maximum les maux physiques qui m'accablaient et de profiter pleinement de mon séjour !

Mon principal temps de liberté se situe le matin. J'ai profité du décalage horaire pour prendre l'habitude de me lever tôt (enfin, ce n'est pas si tôt, mais me réveiller naturellement à 8h est pour moi une grande nouveauté). Ainsi, je peux profiter de la ville tandis que les arbres brillent dorés sous le magnifique ciel bleu. Pour mon grand bonheur, le département de mathématique se situe juste derrière la place des arts, et bien qu'il soit très proche de mon hôtel, par de menus détours, on trouve quantité de cafés à explorer. J'aime cette habitude anglo-saxonne d'avoir partout ces sortes de cafés / sandwicherie où l'on peut tranquillement s'attabler. Beaucoup propose le wifi et c'est tout naturellement que les gens s'y installent pour travailler. C'est là que je vais prendre mon petit déjeuner. Il parait que pour les goûts européens, le café n'est pas toujours très bon : mais je m'en moque car je bois du thé et que les muffins sont, eux, souvent délicieux. Quand je suis raisonnable, je me contente d'un "chai latte" et d'une part de cake carotte-gingembre. D'autres fois je vais dans des lieux un peu plus restaurant, et peu plus originaux aussi, et je prends des pancakes ou du "pain doré" au sirop d'érable ou des oeufs au bacon.

Je passe la journée à travailler à l'université. Depuis mon bureau, je ne vois qu'un haut mur gris un peu terne, mais je sais qu'il s'agit de l'opéra (dont la face arrière n'est pas très affriolante) et cela me donne du baume au coeur. Et puis je discute avec mes collègues de la ville, du Québec et j'en apprends donc un peu plus. Ainsi, on me dit que, non, tout le monde n'est pas bilingue à Montréal. La frontière se situe à peu près au niveau de l'université : à l'est les francophones, à l'ouest les anglophones. D'ailleurs, l'université Mc Gill est très proche et est, elle, anglophone. Dans le centre, il semble qu'on puisse parler les deux langues mais la dominante peut changer d'un café à l'autre. Depuis l'université, on peut facilement se rendre sur la Place des arts : soi dans sa partie extérieure, soi dans son équivalent sous-terrain qui communique directement d'un côté avec le bâtiment où je travaille et de l'autre avec la grande galerie marchande d'un building voisin. Je m'y rendrai plusieurs fois, non pas pour flâner dans les belles boutiques mais pour aller à la pharmacie dont je commence à être une habituée.

Le soir, je vais au restaurant. Mais la fatigue, le rhume et le mal de dos m'ont découragée d'aller explorer au delà de mon quartier. Il faut dire qu'entre la rue Saint-Denis et la rue du Prince Arthur, j'ai déjà de quoi faire et l'ensemble des cuisines de la planète à disposition. On peut trouver un peu dommage que les restaurants "québécois" soient finalement si rare et j'aurais donc beaucoup de mal à dire quelles sont les spécialités locales. J'ai bien goûté les "poutines", ces frites recouverte de sauce et de fromage mais on m'a assuré à grands cris que ce n'était qu'une récente invention de fast food et pas du tout un plat traditionnel.  Mais finalement, Montréal est une ville cosmopolite et c'est donc normal que l'on retrouve cette agréable mixité au niveau des restaurants. On trouve de tout : français, italien, grec, polonais, chinois, coréen, vietnamien, japonais, mexicain, éthiopien, thaïlandais, indien, etc. Et puis il y a aussi beaucoup de choses un peu mixtes, à la mode bio végétarienne, ou fusion expérimentale. Enfin, il y a tous les burgers, frites, et pub food à l'irlandaise.  Enfin bref, je ne suis pas morte de faim et j'ai pu varier mon menu chaque soir !

Maintenant, il faut que je parle de Halloween. Le 31 octobre était lundi dernier et c'est ce jour là que les enfants déguisés sont allés quémander des bonbons. Mais pour les grands enfants, ça a commencé dès le week-end à travers de nombreuses fêtes et soirées organisées partout et encore plus dans le milieu étudiant. C'est à l'une de ces fêtes que j'ai été invitée par des collègues vendredi soir et il a fallu que je me procure un costume. Jeudi après-midi est le jour où mon dos m'a fait le plus souffrir et c'est donc en boitillant douloureusement que je suis arrivée à la boutique Eva B du boulevard Saint-Laurent. A l'extérieur, les murs sont recouverts de graffitis colorés et on a l'impression d'entrer dans un squat. C'est une friperie et des vêtements sont entassés partout : une vrai caverne d'Ali Baba. Une jeune femme nous propose du cidre chaud servi gratuitement dans de petits verres et nous oriente vers le sous-sol. C'est là qu'on trouve les costumes à louer. Nous entrons dans un labyrinthe de robes, de capes, de vestes, de tout ce qu'on veut, une enfilade de petites pièces remplies à ras bord de tout et de n'importe quoi. Pour moi qui ai le goût du théâtre et du déguisement, c'est un vrai paradis qui me ferai presque oublier mon mal de dos. Ce ne sont pas des costumes formatés mais des tas trucs très originaux arrivés ici on ne sait trop comment. Chacun peut alors se créer son propre déguisement selon son envie et son imagination. Pour ma part, je trouve une robe noire magnifique qui mêlée de tulle vert me donne une étrange allure gothique et envoûtante. J'achète aussi un peu de maquillage et me voilà le soir du vendredi une vampire tout à fait remarquable. Je n'ai pas parlé du prix mais c'est très abordable : chaque vêtement se loue entre 5 et 20 dollars, on vous fait la facture quand vous sortez du magasin.

La fête a lieu le vendredi soir sur le boulevard Saint-Laurent. Partout, des soirées sont organisées et la rue grouille de groupes déguisés pas encore complètement éméchés. Je retrouve une ambiance un peu dublinoise, festive et agréable. Là où je vais, il y une grosse moitié de francophones avec beaucoup de français et quelques québécois. Les autres viennent de tous les pays du monde et parlent l'anglais ou l'espagnol. Je discute avec des américaines et d'autres expatriés. Je ne rentre pas trop tard car le lendemain, je pars pour Québec !

Ma seconde semaine à Montréal ressemble assez à la première, le soleil brille et les feuilles ne sont pas encore tombées. Je me déplace jusqu'à Little Italy où se concentre l'activité économique de la communauté italienne arrivée dans les années 50. Il y a le "Café Italia" où se réunissent les vieux italiens pour boire un vrai cappuccino, il y a aussi un très chic restaurant qui a la réputation d'être fréquenté par la Mafia. De la ville, il me reste encore de nombreux quartiers à découvrir mais en deux semaines, j'ai plus appris sur Montréal et le Québec que je ne l'avais fait de toute ma vie...

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