Les Oiseaux
Vendredi 10 juin
Ce matin, réveil tranquille pendant qu’un premier groupe est parti en balade matinale. Le groupe des paresseux, qui se trouve composé des même membres que le groupe des lents de la veille, se rassemble petit à petit et prend le chemin du point de rendez-vous. Aujourd’hui, nous allons faire la petite excursion que j’ai suggérée vers «l’île aux oiseaux». Le départ se situe à quelques kilomètres au nord du camping, près de la mer. Quand nous arrivons, le vent souffle si fort qu’il est difficile d’ouvrir les portières. Enroulés dans nos imperméables, nous montons dans l’engin qui doit nous conduire jusqu’au cap que l’on devine dans la brume. Nous devons traverser une sorte de grande lagune sombre : imaginez la baie du Mont St-Michel à marée basse avec du sable noir. Pour ce faire, nous sommes en fait tirés par un tracteur à l’intérieur d’une remorque en bois, étrange moyen de locomotion. Nous sommes l’ensemble de notre groupe (12 personnes) et tout un tas d’autres gens. Notre guide est un grand islandais très souriant qui parle anglais et ne semble pas trop gêné par le temps. Le tracteur commence donc son avancée dans le désert de sable noir. Avec la brume et les nuages, le continent est à peine visible, on a l’impression d’avancer dans un enfer désolé, sombre et froid. Les rafales de vent qui soulèvent des nuées de sable tout autour de nous n’arrangent rien.
Nous voilà au pied de cette île. Tout ce que l’on peut voir, c’est cet immense rocher sur lequel grimpe une dune sombre. Cette dune, il va falloir la gravir, mais le vent n’a pas faibli et il commence même à pleuvoir. Courageusement, le groupe frissonnant avance pas à pas dans le sable. Là, nous vivons ce que nous pouvons appeler une «expérience de extrême» : on ne voit pas à plus de quelques dizaines de centimètres autour de soi et, de toutes façons, il faut fermer les yeux car le vent nous attaque à coup de sable dans le visage. Cependant, il faut avancer, un pied à la fois, sur la dune abrupte qui s’affaisse sous nos pieds, nous faisant chuter dans le sable humide.
Le guide, toujours joyeux, nous accueille en haut et s’assure que tout le monde est bien arrivé entier. Il nous raconte un peu l’histoire de l’île. C’est ici qu’est arrivé le premier habitant d’Islande, qui est resté sur cette île pendant un an avant de s’établir dans ce qui deviendra Reykjavik. Il avait vraiment intérêt à venir de Novège pour décider sérieusement de rester dans ce pays, n’importe qui d’autres serait parti immédiatement ! Enfin, à l’époque, le désert noir que nous avons traversé n’existait pas encore, il était encore recouvert par la mer. Ce sont les poussières volcaniques qui se sont amoncelées, bloquées par le rocher, et ont repoussé les flots. Nous marchons dans le vent et la pluie jusqu’à une petite cabane où tout le monde se réfugie. J’avoue qu’à ce moment, j’ai eu un doute sur le bien fondé de cette balade. Je me suis dit que tous devaient se demander comme moi ce que nous faisions ici, sous ce temps apocalyptique où on ne verrait aucun oiseau et que donc, tout le monde allait me détester ! Mais heureusement, le guide annonce que justement, vu le mauvais temps, le fameux oiseaux macareux ne seraient pas sortis pêcher et qu’ils devraient être nombreux sur la falaise.
Nous ressortons donc de la cabane, il y a toujours du vent mais moins de pluie et nous montons un peu plus haut sur l’île. Nous passons à côté du nid d’un gros oiseau noir. Celui-ci s’est éloigné, mécontent, et tourne au dessus du groupe alors que nous observons tranquillement ces deux oeufs. Il n’attaquera pas le groupe, mais si nous nous isolons ou traînons trop longtemps, il n’hésitera pas à nous foncer dessus pour protéger sa progéniture ! Un peu effrayés, on n’a pas envie de quitter le groupe ! Enfin, nous voilà au bord de la falaise, et là, oh miracle, les macareux ! Ce sont de très jolis petits oiseaux à l’allure colorée et amusante. Ils vivent de nombreuses années et nidifient dans les falaises pendant l’été. Ils sont très nombreux aujourd’hui, et nous les observons de très près. Tout le monde est enchanté et prend plein de photos. Le paysage est aussi assez impressionnant : en bas de la falaise, nous pouvons voir la mer se rompre en rouleaux contre le sable noir sur des kilomètres. De l’autre côté, le désert que nous avons traversé se fond dans la brume et l’horizon. Après l’observation des macareux, nous redescendons vers la remorque. Descendre la dune est beaucoup plus amusant que de la monter. On peut courir dans le vent et se laisser aller à toute vitesse. Sur le retour, le vent est si fort qu’il nous sèche mais nous sommes frigorifiés.
Tout le monde est finalement enchanté de la balade malgré les mauvaises conditions climatiques. Nous rentrons au camping où nous préparons de la soupe pour tout le monde et mangeons des sandwichs bien au chaud dans la salle. Mais le temps a changé, et il fait maintenant grand soleil ! Après un peu de repos, nous repartons donc vers Skaftafell où nous marchons tranquillement au pied de la montagne jusqu’au bord du glacier. Sa langue de glace se termine par un petit lac et des rivières. Nous voudrions pouvoir aller toucher les grands murs gelés, noirs de cendre, mais l’eau nous en empêche. On se contente donc de sauter sur les cailloux, de grimper sur les collines, de profiter du soleil. Le vent souffle toujours fort, formant parfois des tornades de poussière impressionnantes. La végétation est rare et ne pousse qu’au ras du sol, comme ces arbustes que nous voyons, entièrement couchés avec leur tronc et leurs branches.
Le soir au camping, alors que nous nous installons pour le repas, nous découvrons les capacités contorsionnistes de notre tente. Le vent souffle extrêmement fort ce soir. La plupart de mes collègues sont en bungalows, nous ne sommes que trois tentes dehors. L’une d’elle n’a pas résisté et ses arceaux tordus ne lui permettent plus de tenir : son propriétaire a pris d’urgence un lit à l’intérieur. La seconde tente est entièrement couchée mais celui qui doit y dormir assure qu’il n’y a pas de problème (assez étonnement, ce sera vrai). La notre se plie, se tord, se couche et se replie, mais toujours se relève. Plusieurs fois, nous avons eu peur de la voir s’envoler et nous l’avons d’ailleurs renforcée à coup de fils et de sardines, mais non, elle revient toujours à sa forme initiale. C’est pourtant la plus grande des trois tentes et sa prise au vent est assez importante, nous ne nous expliquons pas ces capacités incroyables. Pendant la nuit, en plus de la lumière, du froid et des moutons, il nous faudra donc composer avec le vent, se réveillant parfois écrasé par le tissus extérieur, mais nous y survivrons tout à fait correctement et dormirons très bien ! La luminosité qui reste importante toute la «nuit» restera notre principal problème. Car oui, ce n’est pas une blague, il fait vraiment jour tout le temps !
Le Glacier
Jeudi 9 juin
Nous quittons le camping le lendemain matin vers Skaftafell, point de départ pour les randonnées vers le glacier. Nous avons été rejoint hier soir par d'autres membres du groupes, nous sommes donc 12. Provisions dans le sac à dos, bien équipés, nous nous lançons à l’assaut de la montagne. Nous n’irons pas sur le glacier, car cela demande un guide et un équipement particulier, mais nous avons l’intention de grimper le pic qui le jouxte. La balade commence tranquillement et nous rejoignons une jolie chute d’eau. A ce moment, nous décidons de faire deux groupes. Ce début de randonnée nous donne déjà une image de nos capacités. Le groupe des rapides partira devant pour pouvoir monter jusqu’au sommet. Les lents pourront faire la boucle «classique» qui monte déjà bien haut. Je prend la tête du second groupe et notre petite procession prend joyeusement son rythme.
Le début n’est pas trop difficile. Nous nous retrouvons sur un plateau caillouteux balayé par les vents. Le bonnet et les gants ne sont pas de trop et j’apprécie particulièrement ma petite veste coupe vent. En contre bas, s’étend la plaine noire ondulée de rivières. Le vent soulève les cendres, formant des tourbillons de bronze. La lumière qui perce les nuages donne au paysage un aspect mordoré. Et sur notre droite, le glacier apparaît majestueux dans le brouillard. Nous quittons petit à petit les cailloux pour traverser une forêts d’arbustes à peine bourgeonnés en ce début juin. Entre deux bosquets, sur de gros talus au bord d’une rivière, nous nous arrêtons pour manger. Le vent s’est calmé et le soleil a chassé les nuages, nous sommes si bien installés qu’il nous est bien pénible de repartir.
Le chemin contourne un petit sommet pour rejoindre une crête. Je redoutais, à raison, la montée, mais arrivée en haut quel spectacle ! Nous marchons au sommet de la crête, sur un plateau de plusieurs centaines de mètres de large recouvert de cailloux. Sur la droite, le plateau descend en pente douce mais à gauche il se termine par une abrupte falaise. C’est derrière cette falaise que se dresse ce que nous ne pouvions voir jusqu’alors : une autre partie du glacier qui prend sous le soleil et les cendres des couleurs incroyables. Le sommet brille de teintes rouges et jaunes, la neige oscille entre le blanc, le gris et l’ocre alors que la roche noire y dessine des arabesques. En face de nous, deux pics, deux pointes noires sur le ciel. A notre droite, le glacier embrumé. Et vers l’est, la plaine qui semble s’étendre à l’infini dans un horizon mélange de terre, de mer et de ciel. Ce que nous ressentons en haut de cette crête n’est pas uniquement la beauté de ce qui nous entoure, c’est un sentiment plus fort, celui d’être au coeur d’une nature impressionnante et forte, de ces montagnes brutes qui semblent surgir de la plaine. Nous sommes entourés de glaces et de cendres, il est tout simplement incroyable de se trouver là où nous sommes.
Nous continuons d’avancer sur la crête vers les deux pics noirs. Mais arrivés à leur niveau, notre route avance horizontalement à flan de montagne. C’est là qu’il est possible de bifurquer vers le sommet, ce que nous ne ferons pas. Nous avançons sur des cailloux sombres, battus par le vent. Nous traversons quelques névés ou rivières gelées. Les cendres se mêlent à la glace pour former une boue noire sur la neige blanche. Ils ne nous gênent pas mais sont présents partout. Nous les voyons sur les montagnes alentour qui grisent la neige. Nous les sentons sur le sol sous nos pied, dans la mousse qu’ils colorent d’une improbable couleur grise. Il arrive que le vent les soulève en rafale et nous devons tourner le visage pour les éviter.
Nous apercevons quelques courageux qui crapahutent en haut du pic, serait-ce le reste du groupe ? Notre chemin passe de l’autre côté de la montagne et nous les voyons courir joyeusement vers nous. Ils ont été rapide mais ne se sont pas encore arrêtés pour manger alors qu’il est déjà 15h (nous avons eu le temps de faire deux pauses). Nous les laissons donc se mettre à l’abri pour manger et commençons notre descente. Nous longeons à nouveau une falaise. Elle nous sépare du glacier par un gouffre d’un kilomètre de large au fond duquel s’étend une immense langue de glace. Elle s’avance, grise et noire, découpée de profondes crevasses pour se terminer dans de petits lacs glacés.
Nous descendons donc, et si la descente ne m'essouffle pas comme la monté, elle me lasse bien vite. La fatigue se fait sentir, je suis moins résistante au froid et au vent, mon corps tout entier me demande d'arrêter. Et la descente n’en finit pas, j’avance mécaniquement parmi les cailloux et les buissons. J’essaie de marcher sur la mousse imbibée de cendres qui amorti mes pas agréablement plutôt que sur les cailloux douloureux. Après un temps infiniment long, nous arrivons en bas. Nous avons dû faire un détour car les autres sont là avant nous. Enfin, nous pouvons rentrer au camping où l’on préparera de la soupe et des pâtes pour notre grande tablée avant d’aller se blottir dans notre tente.
Arrivée en Islande
Mercredi 8 juin 2011
J’ai, cette année l’occasion d’assister à une conférence à Reykjavik. L’université me paye le voyage et le séjour et j’ai décidé d’ajouter un peu pour pouvoir passer quelques jours dans le pays : ce serait dommage d’aller en Islande pour ne voir que des exposés de mathématiques !
Nous voilà donc Sébastien (qui en a profité pour me suivre là bas), moi et plusieurs de mes collègues. Nous nous retrouvons à l’arrivée de l’avion à Reykjavik et le temps de récupérer les voitures et de faire une rapide pause café, nous voilà sur les routes islandaises. Sébastien et moi avons la charge d’une voiture avec deux de mes collègues. Il y a pour l’instant une autre voiture que nous arrivons à suivre le long de la route numéro 1. Premier arrêt : courses. Nous serons jusqu’à 12 au camping et n’hésitons pas à prendre beaucoup de nourriture.
Puis un peu plus tard, nous voilà à la pointe sud de l’île pour déjeuner près d’une chute d’eau. La rivière coule dans son lit de sable noir, il tombe une bruine glacée. Nous approchons de la chute, elle est assez haute mais peu large et tombe dans un tout petit bassin. On peut s’approcher très près si on n’a pas trop peur de se faire mouiller. Nous décidons ensuite de profiter de l’éclaircie qui a chasser la bruine pour monter en haut de la chute. De là haut, nous pouvons admirer le double arc en ciel qui se forme dans le nuage d’eau en bas de la falaise. Nous remontons un peu la rivière sur son plateau verdoyant avant de redescendre pour déjeuner. Nous pique-niquons à l’abri d’un petit préau car le temps a de nouveau changé et il tombe de la grêle, voire de la neige.
Nous reprenons la route, profitant des magnifiques paysages. Bien que l’Islande soit très montagneuse, elle n’a rien de vallonné. Nous roulons sur une route parfaitement plate, au niveau de la mer. Vers notre droite, la plaine s’étend sur des kilomètres jusqu’à la plage. Mais à gauche, se dressent d’impressionnants rocs nus et abrupts. On passe directement de l’horizontale à la verticale sans transition aucune. Nous passons à côté du fameux volcan Eyjafjoell qui depuis son glacier a mis en panique l’ensemble de l’Europe l’année dernière. Nous cherchons à rejoindre la mer car nous voudrions voir les plages. Nous tournons une première fois et arrivons sur une ferme. Nous tournons à nouveau, et nous nous retrouvons à l’entrée d’une réserve pour oiseaux qui malheureusement est fermée pour laisser les oiseaux tranquilles en période de ponte. Nous descendons nous balader un peu et grimpons sur des rochers étranges aux formes extravagantes. C’est de la roche volcanique qui a du sécher rapidement après une éruption. On se croirait sur la lune ou dans un film de science fiction. Les rochers se dressent en becs sombres et tordus, formant arches et coupoles naturelles. On pourrait passer des heures encore à se promener dans cet étrange paysage mais il nous repartir. De façon générale, le terme qui revient pour décrire ce que je vois est «minéral». Il nous arrive de rouler pendant des kilomètres sans aucune autre végétation d’une fine mousse sur des champs de cailloux. Parfois, c’est un peu plus vert et il pousse un peu d’herbe où paissent les moutons mais rares sont les arbres.
Après la ville de Vik, nous entrons dans la zone du nuage de cendre. Au départ, rien de bien impressionnant. Seule la poussière grise sur l’herbe autour de la route nous indique l'éruption récente. Nous nous arrêtons à nouveau près d’une chute d’eau. En marchant, nous remarquons que la mousse est complètement imbibée de cendres, à chacun de nos pas, elle se soulève en un nuage brun. Nous grimpons sur ce tapis mou jusqu’en haut de la chute, la cendre dans l’air nous pique le visage et les yeux et vient jusque sur notre langue, nous laissant son goût minéral. Ici, l’influence sur l’atmosphère se ressent beaucoup plus et les cendres forment un fin brouillard qui donne à la lumière un aspect ambré et magique.
Nous repartons et traversons ce qui semble être l’épicentre du nuage. D’un seul coup, la visibilité se réduit, nous ne voyons plus l’autre voiture devant nous, nous ne voyons plus le paysage. La route avance au milieu de nulle part dans un brouillard couleur terre, très dense. Sur le côté, le sol est gris et uniforme, on se croirait dans un film post-apocalyptique. Le vent frappe en rafale balayant devant nous des langues grises qui se déplacent sous nos roues. C’est de ce paysage extraordinaire que se dégagent petit à petit devant nous de gros rochers, puis derrière eux, l’immense glacier Vatnajökull entre le cendres et nuages : vision inoubliable.
Nous arrivons donc enfin à notre camping qui est très bien équipé : dans la grande pièce commune (chauffée), nous pouvons préparer un grand repas pour l’ensemble du groupe. Puis nous allons nous emmitoufler dans nos sacs de couchage sous la tente, la journée a été longue et belle : l’Islande s’est dévoilée dans toute sa splendeur effrayante.
Arrivée en Islande
de s’est dévoilée dans toute sa splendeJ’ai, cette année l’occasion d’assister à une conférence à Reykjavik. L’université me paye le voyage et le séjour et j’ai décidé d’ajouter un peu pour pouvoir passer quelques jours dans le pays : ce serait dommage d’aller en Islande pour ne voir que des esposés de mathématiques !
Nous voilà donc Sébastien (qui en a profité pour me suivre là bas), moi et plusieurs de mes collègues qui profitent de la même occasion. Nous nous retrouvons à l’arrivée de l’avion à Reykjavik et le temps de récupérer les voitures et de faire une rapide pause café, nous voilà sur les routes islandaises. Sébastien et moi avons la charge d’une voiture avec deux de mes collègues. Il y a pour l’instant une autre voiture que nous arrivons à suivre le long de la route numéro 1. Premier arrêt, courses. Nous serons jusqu’à 12 au camping et n’hésitons pas à prendre beaucoup de nourriture.
Puis un peu plus tard, nous voilà à la pointe sud de l’île pour déjeuner près d’une chute d’eau. La rivière coule dans son lit de sable noir, il tombe une bruine glacée. Nous approchons de la chute, elle est assez haute mais peu large et tombe dans un tout petit bassin. On peut s’approcher très près si on n’a pas trop peur de se faire mouiller. Nous décidons ensuite de profiter de l’éclaircie qui a chasser la bruine pour monter en haut de la chute. De là haut, nous pouvons admirer le double arc en ciel qui se forme dans le nuage d’eau en bas de la falaise. Nous remontons un peu la rivière sur son plateau verdoyant avant de redescendre pour déjeuner. Nous pique-niquons à l’abris d’un petit préhaut car le temps a de nouveau changer et il tombe de la grèle, voire de la neige.
Nous reprenons la route, profitant des magnifiques paysages. Bien que l’Islande soit très montagneuse, elle n’a rien de valloné. Nous roulons sur une route parfaitement plate, au niveau de la mer. Vers notre droite, la plaine s’étend sur des kilomètres jusqu’à la plage. Mais à gauche, se dressent d’impressionnants rocs nus et abrupts. On passe directement de l’horizontale à la verticale sans transition aucune. Nous passons à côté du fameux volcan Eljafoll qui depuis son glacier a mis en panique l’ensemble de l’Europe l’année dernière. Nous cherchons à rejoindre la mer car nous voudrions voir les plages. Nous tournons une première fois et arrivons sur une ferme. Nous tournons à nouveau, et nous nous retrouvons à l’entrée d’une réserve pour oiseaux qui malheureusement est fermée pour laisser les oiseaux tranquilles en période de ponte. Nous descendons nous balader un peu et grimpons sur des rochers étranges aux formes extravagantes. C’est de la roche volcanique qui a du sécher rapidement après une éruption. On se croirait sur la lune ou dans un film de science fiction. Les rochers se dressent en becs sombres et tordus, formant arches et coupoles naturelles. On pourait passer des heures encore à se promener dans cet étrange paysage mais il nous repartir. De façon générale, le terme qui revient pour décrire ce que je vois est «minéral». Il nous arrive de rouler pendant des kilomètres sans aucune autre végétation d’une fine mousse sur des champs de cailloux. Parfois, c’est un peu plus vert et il pousse un peu d’herbe où paissent les moutons mais rares sont les arbres.
Après la ville de Vik, nous entrons dans la zone du nuage de cendre. Au départ, rien de bien impressionant. Seule la poussière grise sur l’herbe autour de la route nous indique l’erruption récente. Nous nous arrétons à nouveau près d’une chute d’eau. En marchant, nous remarquons que la mousse est complètement imbibée de cendres, à chacun de nos pas, elle se soulève en un nuage brun. Nous grimpons sur ce tapis mou jusqu’en haut de la chute, la cendre dans l’air nous pique le visage et les yeux et vient jusque sur notre langue nous laissant son gout minéral. Ici, l’influence sur l’atmosphère se ressent beaucoup plus et les cendres forment un fin brouillard qui donne à la lumière un aspec ambré et magique.
Nous repartons et traversons ce qui semble être l’épicentre du nuage. D’un seul coup, la visibilité se réduit, nous ne voyons plus l’autre voiture devant nous, nous ne voyons plus le paysage. La route avance au milieu de nulle part dans un brouillard clair et coloré. Sur le côté, le sol est gris et uniforme, on se croirait dans un film post-apocalyptique. Le vent frappe en rafale balayant devant nous des langues grises qui se déplacent sous nos roues. C’est de ce paysage extraoridnaire que se dégagent petit à petit devant nous de gros rochers, puis derrière eux, l’immense glacier Vatnajökull entre le cendres et nuages : vision innoubliable.
Nous arrivons donc enfin à notre camping qui est très bien équipé : dans la grande pièce commune (chauffée), nous pouvons nous préparer un grand repas pour l’ensemble du groupe. Puis nous pouvons aller nous emitoufler dans nos sacs de couchage sous la tente, la journée a été longue et belle : l’Islanur effrayante.