Au matin du 3ème jour, le filleul a repris ses habitudes de sommeil. J'ai été réveillée tôt par l'enfant et suis sortie de la tente. Et c'est moi qui vois, toute seule, une jolie famille de loutres qui courent et sautent sur le tas de branches dans la rivière !
Ce matin, nous avons décidé d'aller profiter du petit-déjeuner de l'auberge juste au dessus du camping, attirés par le panneau "Breakfast 8-10 AM, everyone welcome!". C'est dans une jolie maison qui surplombe la rivière. Nous mangeons pancakes, oatmeal, toasts à la confiture et omelettes avec délectation. Assis à côté d'une grande baie vitrée, nous avons vue sur la rivière et apercevons sur l'autre rive un ours noir ! Il se balade très distinctement pendant plusieurs minutes, sans doute venu pêcher son petit-déjeuner lui aussi.
De retour au camping, nous nous occupons de rangement, douches et organisation. Depuis hier soir, nous avons des voisins : une famille russo-canadienne arrivée ici depuis Calgary. Il y a 3 enfants, un grand de 10-12 ans, une petite fille d'environ 8 ans et un plus petit de 2 ans. Notre enfant tout blond pourrait facilement passer pour un membre de la famille. Nous blaguons avec le compagnon car l'enfant a été assez pénible et bruyant (en particulier ce matin à l'auberge) et réfléchissons à des stratégies absurdes pour le leur laisser.
En réalité, l'enfant est intimidé par la barrière de la langue. Il est globalement très contrarié que dans ce pays, personne ne parle français. Le filleul lui s'est rapidement lié avec la petite fille car ils parlent un langage commun : celui assez universel du "taper dans un ballon".
Nous repartons bientôt : il est l'heure d'aller rejoindre l'embarcadère pour la balade en bateau achetée il y a quelques jours. Sur place, nous découvrons que nos voisins de camping ont suivi notre exemple et sont, eux aussi, de la balade. Nous montons dans une grosse barque à moteur pilotée par l'arrière. Nous sommes assis au 2ème rang tandis que nos voisins sont au premier. Les enfants portent de gros gilets de sauvetage, les nôtres sont rangés sous les sièges.
Le bateau part à vive allure sur la rivière. Le capitaine ralentit parfois pour nous pointer des éléments du paysages ou de jolis oiseaux. C'est une belle rivière sauvage entourée de forêt. Nous voyons de nombreux pêcheurs en particulier au bord des torrents affluents où passent les saumons à certaines saisons. Certains de ces pêcheurs sont des yuroks. Historiquement, la rivière est leur territoire. D'ailleurs, nous croisons des touristes faisant une balade guidée dans une barque traditionnelle yurok creusée dans un tronc de séquoia.
Les grandes stars de la balade sont les aigles. Nous en voyons deux, très distinctement, en haut d'un grand arbre, près de leur nid. Plus tard, nous les voyons planer au dessus de nous. Nous cherchons aussi les ours sur les berges mais eux resteront cachés.
À un moment, le capitaine indique qu'il faut s'accrocher car il va tourner. Je me tiens plus ou moins au banc devant moi avant de virevolter d'un seul coup et de me retrouver projetée contre le bord alors que tout le monde se casse la figure. En effet, il ne fait pas que "tourner" , il amuse la galerie avec ce qui ressemble à un dérapage contrôlé sur la rivière. Ça fonctionne bien : les enfants se croient sur un manège et sont morts de rire. Seul le petit des voisins n'est pas convaincu : il pleure sur les genoux de sa maman qui passe le reste de la balade à le rassurer et le consoler. Le capitaine nous refait le coup des virages plusieurs fois mais je suis maintenant mieux préparée et arrive à rester en place.
En tout, la balade dure une heure. Nous sommes remontés assez loin sur la rivière pour quitter les nuages de la côte et voir le soleil. En tout cas, entre les virages du capitaine et les aigles dans les arbres, les enfants sont absolument ravis. Nous allons déjeuner à la station service (où on peut acheter du poulet frit avec des pommes de terre) et réfléchissons au reste de notre après-midi.
Cette fois, nous avons bien envie de faire la balade de la côte. Nous montons au point de vue au dessus du camping. C'est un peu brumeux mais on a tout de même une jolie vue et on se lance sur le chemin. Assez vite cependant, il apparaît que nous ne pourrons pas marcher très longtemps car l'enfant est fatigué et d'humeur ronchonne. Rien ne va. Il veut qu'on lui tienne la main, il y a trop de cailloux, son papa va trop vite, ou alors au contraire on va trop lentement, il a soif, il a faim. Il est contrarié car nous sommes au dessus de la mer mais pas au bord de la mer et puis il voudrait bien que ce chemin aille quelque part. Après une nouvelle crise de pleurs, nous arrêtons les frais. Seb reste avec l'enfant assis dans un coin pendant que je continue un peu avec le filleul. Puis assez vite nous revenons et parcourons le petit bout de chemin que nous avions réussi à faire. De retour près du départ, un autre chemin d'environ 1km est indiqué. Je propose à Seb et au filleul de la faire pendant que je les attends sur le parking avec l'enfant. Ainsi, nous aurons chacun eu un petit morceau de randonnée malgré la mauvaise volonté de l'enfant.
On approche déjà de la fin d'après-midi mais nous décidons tout de même d'aller voir la plage au sud de Crescent City. L'enfant réclame de marcher dans les vagues depuis le début de notre promenade. De jolis rouleaux pas trop méchants éclatent sur le sable noir. Je mets les pieds dans l'eau et décide de me mettre en maillot malgré la fraîcheur. C'était déjà le cas pour l'enfant et je suis bientôt rejointe par Seb et même par le filleul, qui était pourtant très réticent à l'idée.
L'eau est très froide mais cependant moins qu'à d'autres endroits. Je peux m'enfoncer un peu jusqu'à ce que des vagues finissent de me mouiller. L'enfant est trempé lui aussi ainsi que Seb et le filleul. Voilà notre unique baignade dans le Pacifique pour cet été !
Nous serions bien rester dîner sur la plage où le soleil se couche doucement mais notre matériel de cuisine est resté à la tente. Nous revenons donc au camping pour grignoter le reste du poulet frit. Pour réchauffer les pommes de terre, nous les calons dans les braises de notre feu avec de l'aluminium. Puis nous nous couchons pour notre dernière nuit dans ce joli petit coin.