Samedi 11 juin
Dernier jour au camping, après la nuit venteuse nous partons en excursion avec le reste du groupe. Aujourd'hui, nous allons voir un lac formé par la fonte du glacier un peu plus au nord. Une partie du groupe y est déjà allé hier matin pendant que nous paressions mais tout le monde accepte d'y retourner. Nous suivons la route numéro 1 jusqu'à ce que le lac apparaisse sur notre gauche et nous comprenons l'engouement que provoque le lieu. La langue de glace large de plusieurs centaines de mètres se termine par de hautes falaises gelées qui tombe dans l'eau bleue. Le lac lui même est large et profond, il est parsemé d'icebergs tombés du glacier ce qui lui donne cet aspect incroyable. Nous nous approchons de la rive et commençons doucement notre balade.
Il fait un temps magnifique, nous sommes protégés du vent par de gros monticules caillouteux et profitons pleinement du soleil. L'eau claire et glacée brille sous le ciel. Certains petits glaçons flottent à proximité et le nouveau jeu du groupe consiste à les noyer à coup de pierre. Plus loin, dérivent les immenses icebergs bleutés aux formes improbables. Et quelle est cette petite boule noire qui sort de l'eau ? Mais c'est un phoque bien sûr ! Ils sont plusieurs à pointer du museau avant de plonger gracieusement et de disparaître. D'autres animaux peuplent le lac. Les canards d'abord : les femelles grises ressemblent aux colverts mais les mâles sont blancs et noirs avec une très légère teinte vert doré sur le cou. Ils se promènent en groupe et émettent de drôles de grognements quand nous les dérangeons. Et puis nous croisons des familles d'oies avec leurs petits. Le ciel est peuplé de plus petits oiseaux aux formes harmonieuses et de grandes mouettes noires nous observent depuis leurs perchoirs de cailloux. La promenade est si agréable que nous n'avançons que très lentement, s'arrêtant tous les deux pas pour admirer le glacier qui semble émerger de l'eau sous le soleil.
C'est ici que nous prenons notre pique-nique, installés devant cette vue splendide, assis contre de gros cailloux. Nous restons longtemps à profiter simplement du moment, du paysage, de la douceur de l'air sous le soleil. C'est très tranquillement que nous retournons vers les voiture. Mais avant de repartir, quelqu'un a l'idée de traverser la route pour aller voir la mer. Nous découvrons alors une immense plage de sable noir qui semble s'étendre jusqu'à l'horizon. Les vagues se brisent avec tant de grâce que l'on a qu'une envie, c'est de s'y baigner. Cependant, les énormes glaçons déposés par la mer qui jalonnent la plage telles des sculptures modernes et scintillantes nous rappellent que la température n'est pas tout à fait supportable. Je ne résiste pas tout à fait et retire mes chaussures et les jambes de mon pantalon (qui a cette étonnante capacité à se transformer en short) pour marcher pieds nus. Le sable noir, chauffé par le soleil, est tiède et doux sous le pas. Je m'aventure dans l'eau mais ne reste pas plus de quelques secondes tant le froid est mordant. Marcher pieds nus sur une plage couverte de glaçons, voilà qui est original. Surtout que, frileuse, j'ai gardé mon bonnet et mon écharpe ce qui me donne une allure assez incohérente. Tandis que les autres jouent à la pétanque avec des cailloux, je vais m'allonger sur le sable. Je sens le soleil sur mon visage, l'odeur de la mer, le sable chaud sur mes jambes et le vent qui me rafraîchis, je pourrai me croire à Granville. Mais je n'ai pas envie d'être ailleurs, l'endroit est trop exceptionnel.
L'après midi est déjà quelque peu avancée quand nous repartons pour aller voir l'autre lac, plus petit mais plus sauvage, qui se trouve un peu plus loin. En effet, l'effet de départ est moins impressionnant. Mais nous sommes plus près du glacier et pouvons mieux observer ces falaises de glace si fascinantes. Elles ont cela de frustrant que l'on ne peut jamais les atteindre. D'abord, elles semblent toujours plus près que ce qu'elles sont réellement. Ensuite, alors qu'on croit les atteindre, une rivière infranchissable que nous n'avions pas vue nous en sépare toujours. En effet, les lacs, larmes du glacier, s'effilochent toujours en plusieurs cours d'eau qui partent vers la mer dans la longue plaine. Parfois, une de ces falaises s'effondre avec grand fracas dans le lac, mais si nous l'entendons toujours, il est souvent trop tard pour admirer le spectacle. Attirés par le glacier, nous marchons sans y faire attention le long du petit lac, gravissant les monticules de cailloux, redescendant sur la rive, avançant comme nous le pouvons... Quand nous prenons le chemin du retour, le parking semble d'un seul coup beaucoup plus loin et la balade impromptue se transforme en véritable marche de deux heures. Il faut dire qu'ici, les heures passent sans que l'on s'en rende compte, le soleil n'est plus un repaire et le jour ne se termine jamais.
Le soir, épuisés mais heureux, plein du soleil de cette journée, le visage un peu trop rouge, nous rentrons au camping pour notre dernière soirée. Nous partageons un repas fait de nos dernières provisions et entamons des parties de loup garou animées. Nous avons réussi à trouver un consensus pour l'heure du départ du lendemain : pas toujours facile de s'arranger quand on est si nombreux mais heureusement, chacun est assez conciliant. Partis à 10h le dimanche, nous ferons presque d'une traite le trajet du retour pour être à l'heure à l'inauguration de notre conférence. Enfin, nous aurons tout de même le temps de prendre un pique-nique aux rillettes d'agneaux sur une plage près de Vik, sur le sable noir bien sûr !