Nous arrivons à Trinidad par avion tôt le samedi 6 août au matin. Dès l'atterrissage, on se rend compte que l'île est beaucoup plus grande que celles que nous avons visitées jusqu'alors. Il y a des montagnes, mais elles sont lointaines et laissent la place à de larges plaines. Le taxi qui nous emmène à Port-of-Spain roule pendant 1/2h sur une large autoroute. Nous logeons chez un couch surfer (cf le site couch surfing) que Rébecca connait déjà. Il vit dans une petite maison dans un quartier résidentiel accessible à pied depuis le centre ville. Port-of-Spain aussi est à l'échelle de l'île, c'est une véritable ville, nous nous lançons dans ses rues sous le ciel brulant. La rue principale est pleine d'une agitation fourmillante. Les voitures avancent au pas entre les multiples piétons qui s'affairent autour des étals de fruits, légumes, vêtements, portables, etc. Les boutiques sont à la fois dehors et dedans, partout à la fois. Nous voudrions rejoindre un "food hall" que nous savons être à l'étage d'un centre commercial. Mais il y a des centres commerciaux partout, labyrinthe infini entre les rues agitées, ils se ressemblent tous, comment savoir lequel est le bon ? Marcher dans la ville étouffante de chaleur, de pollution, de foule, de bruit, en passant sans arrêt de passages couverts et climatisés au soleil de plomb, alors que nous n'avons ni mangé ni bu, est épuisant. Nous finissons par nous écrouler dans un subway. La chaine de sandwich a pris possession de la ville et l'on en voit partout, ils font la guerre aux KFC qui, eux aussi, ont poussé à tous les coins de rues, engraissant la population à coup de poulet frit.
J'ai faim, mais je n'ai pas envie de manger, l'effusion de viande, de salades, de sauces me dégoute. Nous n'achetons qu'un seul sandwich et surtout, beaucoup d'eau. Un peu rafraichis, nous reprenons notre course éreintante. Nous finissons par trouver, oh miracle, le fameux "food hall". Là bas, nous pouvons acheter des roties chauds et délicieux et les manger assis dans une salle climatisée. Les roties sont des plats qui viennent de la communauté indiennes arrivée dans les caraïbes en tant que travailleurs pauvres après la fin de l'esclavage et très présente à Trinidad. Dans une grosse crêpe épicée, on met de la viande en sauce, des pommes de terres et des légumes. Mon appétit est revenu et le rotie en question est tellement nourrissant que j'aurai à peine besoin de manger pour les deux prochains jours. Sur certaines boutiques indiennes, je vois des inscriptions "All Food Hallal" et l'on croise parfois des jeunes femmes voilées. Il y a donc une communauté musulmane à Trinidad, vient-elle de l'immigration indienne ou d'une conversion plus tardive de la population ?
Après le repas, nous marchons jusqu'au port car nous voulons acheter nos billets de ferry pour Tobago. Cela s'avère impossible : au port, ils ne vendent que les billets du jour même et sinon, il faut passer par des agences qui sont fermées le week-end. Le système d'achats de billets est d'ailleurs assez mal fait. Rien n'est jamais très clair, nous verrons que les agences annoncent le bateau plein quand en fait il est possible d'acheter ses billets autrement, agences dont les adresses sont d'ailleurs difficiles à obtenir. En espérant en trouver une ouverte, nous marchons près du port. Port-of-Spain est le genre de ville qui s'est développée rapidement d'un point de vue économique mais qui n'est pas touristique et n'a pas encore compris l'importance que le loisir pouvait avoir. Ainsi, la zone du port est tout à fait désagréable. Elle est flanquée d'une autoroute urbaine à 8 voies et l'on ne voit pas la mer, cachée derrière des murs gris et des entrepôts. Mais on sent que les choses changent. Nous sommes visiblement dans le quartier des bureaux et grandes entreprises. De belles tours toutes neuves ont poussées et au pied de l'une d'elle, un petit café chic offre une vue sur la mer avec des palmiers. La grande rue aussi est joliment décorée d'arbres et de verdure. Bientôt peut-être, la ville déménagera son port industriel vers des faubourgs lointain et aménagera une jolie promenade en bord de mer...
Le soir, nous ressortons pour diner. Notre hôte habite à côté de Savannah Park. A la sortie du centre, c'est une grande prairie agréable où les gens viennent faire du sport l'après midi, l'équivalent local de Central Park. Le soir, on trouve de petites échoppes qui vendent de la nourriture et des boissons. Il y règne une ambiance gaie et familiale. J'ai du mal à me rappeler que le dollar local vaut quatre fois moins qu'à Saint-Vincent car tout est si peu cher. Je n'ai pas très faim à cause du rotie de ce midi. Je me nourris d'une autre spécialité indienne, le "Doubles", petite galette frite avec une sauce aux haricots. C'est plus un encas qu'un repas mais ça me suffit largement, en euros, cela coûte moins de 50 centimes. Un jus de fruit frais coûte 2 euros, tout comme une viande grillée au barbecue. Nous trainons entre les stands, goûtons les spécialités, puis rentrons tranquillement nous reposer.
Nous sommes réveillés le lendemain matin par la voisine qui, dès 6h30 du matin, allume la musique et inonde la rue de chants religieux. Une habitude dominicale ? Je continue à dormir tant bien que mal, mais la musique perturbe mon esprit et mes rêves. Nous nous levons donc, fatigués, et préparons notre journée. Que faire un dimanche sans voiture à Port-of-Spain ? Nous décidons de rejoindre une station de "maxi-taxis" pour nous rendre à Chaguaramas, pour cela il fait à nouveau traverser la ville. Les maxis-taxis sont des sortes de mini bus du genre de ceux que l'on a pris jusqu'à présent. Nous ne sommes pas surs d'en trouver le dimanche, nous avons un peu peur de nous trouver coincés loin de Port-of-Spain. Nous ne voulons surtout pas rentrer de nuit. La réputation de dangerosité de Trinidad est surestimée, mais se promener seuls dans le centre-ville la nuit reste dangereux. Enfin bon, en attendant, nous sommes dans une pizzéria qui offre le wifi et je mange une glace en regardant la télé allumée. Je vois les clips qui défilent, d'un seul coup, une émission hindou où des jeunes filles font la danse du ventre. Il y a aussi une annonce pour l'audition de "Socca star', la nouvelle star version "Socca" ? (La socca est la musique rythmée très populaire que l'on entend surtout au moment du carnaval).
Finalement, nous rejoignons bien les "maxi-taxis" qui ont l'air de passer régulièrement. Je pensais que Chaguaramas était une petite ville en bord de mer mais, en fait, il n'y a pas de ville. Nous descendons sur une plage où nous nous baignons malgré les averses fréquentes. Elle n'est pas très grande, un peu sale mais correcte, peuplée de familles indiennes qui louent des espèces de "vélos-surf" et s'amusent gaiement. L'eau est tiède, brunie par la pluie récente, mais le bain est agréable après la lourdeur de Port-of-Spain. Chaguaramas est en fait une espèce de réserve naturelle avec plusieurs plages populaires qui s'étalent. Il y a des possibilités de balade en forêt que nous ne ferons pas et des jolies petites îles que nous ne verrons que de loin. Nous faisons le tour du lieu à bord d'un maxi-taxi et retournons vers Port-of-Spain. Nous rentrerons assez vite et attendrons patiemment l'heure d'aller à Savannah Park manger des Doubles et boire des jus de fruit. Le lundi, nous prendrons le bateau pour Tobago. Là bas, nous serons si bien que nous resterons jusqu'au samedi quand nous comptions rentrer le vendredi. Mais il ne faut pas croire que Trinidad n'ait rien à offrir : l'île demande seulement du temps que nous n'avons pas. Avec une semaine de plus et une voiture de location, nous pourrions en faire le tour, voir ses routes où peu de touristes se risquent, voir le lac d'asphalte au sud de San Fernando, chercher le Scarlet Ibis dans les mangroves. Mais cela ne restera que des images rêvées, peut-être pour un futur voyage, un jour...