Notre voyage commence le 1er août en fin d'après-midi quand nous quittons notre appartement parisien avec deux enfants de 5 et 7 ans, trois petites valises, deux gros sacs à dos et trois petits sacs à dos, direction la Gare de l'Est. Le train de nuit n'existait pas lorsque je vivais à Vienne il y a 10 ans. Je l' ai découvert ces deux dernières années lors de quelques voyages professionnels comme une alternative bienvenue à l'avion. Et c'est là que je me suis imaginée avec ma petite famille dans ces cabines un peu désuètes et que je me suis dit "Pourquoi pas ?"
En arrivant sur le quai, nous pensons cependant que notre voyage est compromis. Un groupe discute avec la contrôleuse devant le wagon : "oui je sais que vous avez des billets mais les cabines sont cassées, je ne peux pas vous faire monter". Je montre notre billet "Je suis désolée, vous ne pouvez pas monter non plus". La seule solution semble d'aller "se renseigner" pour prendre le TGV vers Strasbourg puis de se débrouiller, sachant qu'il n'y a évidemment aucun autre train qui fera ce voyage de nuit. Je commence à m'énerver avec les autres puis, alors que Seb est déjà parti aux informations, je pense à montrer notre deuxième billet car nous avons réservé deux cabines. "Ah celui là, c'est bon dit elle". Tant pis alors, on va se serrer. Je commence à faire monter tous les bagages avec les enfants en scrutant le retour de Seb à qui j'ai envoyé un message. Le train doit partir d'ici quelques minutes. Le voilà, nous sommes là tous les quatre et nous partons bien dans le train prévu avec une pensée pour les naufragés sur le quai.
J'ai réservé deux cabines de 2 personnes. Finalement, nous arrivons dans une cabine où il y a 3 places. On entasse les bagages comme on peut et on s'installe. Je me dis "on mettra les 2 enfants sur une couchette et ça ira". Mais en explorant le wagon, je vois très clairement les cabines "cassées" dont les portes sont condamnées mais je vois aussi que notre deuxième cabine n'en fait pas partie : la contrôleuse s'est trompée.
Tout va bien alors... Sauf que le train ne part pas ! Ça fait bien 40 minutes qu'il aurait dû démarrer et nous sommes toujours en gare. Enfin une annonce : il y a un problème de caténaire, c'est à cause des orages, on va partir en retard. À chaque annonce, le retard est plus important. On parle maintenant de 22 ou 23h, soit 3 ou 4h de retard. Ce voyage commence décidément avec beaucoup de péripéties. Prenant notre mal en patience, nous mangeons tranquillement nos sandwichs.
Il est maintenant 22h et on se dit qu'on va installer les lits avant le départ du train. Une dame s'est installée dans notre seconde cabine. Je ne comprends pas très bien si c'est dû aux cabines cassées mais elle a fait ça pour arranger une famille dans sa cabine d'origine. Pas de problème, on est arrangeant. Comme il y a trois places les trois garçons peuvent dormir dans notre cabine principale et moi j'irai avec la dame.
Le contrôleur s'occupe de replier les sièges et d'installer les couchettes. Les enfants sont surexcités. Nous on s'agite pour que tout le monde se prépare pour le coucher : dents, pyjama, toilettes etc. Finalement l'enfant s'installe sur la cabine du bas, Seb sur celle du milieu et le filleul sur celle du haut. Au milieu de ce bazar, le train démarre enfin ! Cela rajoute encore à l'excitation de l'enfant mais on est tous heureux et soulagés. Je dis bonne nuit à tout le monde et rejoins ma tranquille cabine avec ma voisine, laissant Seb se débrouiller. Le lit est confortable, j'ai de l'espace sur mon perchoir et tout est calme : je peux m'endormir bercée par le vrombissement régulier du train.
Le lendemain matin, je suis réveillée un peu après 8h par une annonce : nous arrivons à Munich. Nous sommes très en retard car normalement, l'arrêt Munich est au milieu de la nuit. Un peu après, je retrouve le compagnon et l'enfant. Le filleul dort toujours sur la couchette du haut mais on peut tout de même installer de nouveau les sièges et commencer à prendre le petit déjeuner. La matinée passe doucement tandis que dehors défilent les jolis paysages autrichiens. Le filleul se réveille. On joue à des jeux, on discute, on se balade dans le wagon. Il y a une famille un peu plus loin avec deux petites filles un peu plus jeunes que les garçons et avec qui nous discutons. Plus tard ils loupent leur arrêt à Linz à cause d'une porte bloquée.
Un peu avant 13h, nous arrivons enfin. Le train aurait dû aller jusqu'à Wien Hauptbahnhof, la gare principale. Mais pour une raison qui m'échappe, il s'arrête à Wien Meildling, qui est l'arrêt d'avant : une gare plus petite un peu en dehors de la ville. J'avais reçu un mail absolument pas clair à ce sujet donc ça ne m'étonne qu'à moitié. Mais beaucoup de français n'ont pas eu l'information et se retrouvent perdus dans cette gare inconnue. Nous voilà à courir entre les quais avec tous nos bagages pour trouver le prochain train qui peut nous emmener à bon port. Malgré les informations peu adéquates de la contrôleuse, on trouve un train et quelques minutes plus tard nous voilà enfin arrivés.
L'auberge que j'ai réservée est juste à côté de la gare. Il est trop tôt pour prendre notre chambre mais on peut enfin déposer nos bagages avant de s'écraser dans un café pour déjeuner. Les enfants ont l'air en forme et contents. Moi je suis assez fatiguée. Je sirote mon thé assise sur la terrasse tandis que l'enfant va voir toutes les tables en disant "Hallo !", seul mot d'allemand qu'il vient d'apprendre. Le repas se termine par des glaces (dont une boule au Mozart Kugeln) et c'est enfin l'heure de récupérer notre chambre.
Nous avons une chambre privée pour 4 dans une auberge de jeunesse. Nos lits sont des sortes de box indépendants superposés. C'est plutôt confortable et pratique. On se repose quelques minutes avant d'aller se balader en ville.
Nous prenons le métro jusqu'à Stephansplatz et visitons la magnifique cathédrale. Nous payons même pour monter en haut d'une tour où l'on voit le joli toit coloré et surtout une très belle vue sur la ville. Puis nous marchons tranquillement à travers la vieille ville vers le palais royal. Je retrouve Vienne avec plaisir et suis heureuse de faire découvrir la ville aux enfants. En sortant du vieux centre, nous prenons à droite vers les Volksgarten pour rejoindre le Rathaus.
La grande Rathausplatz reflète bien l'esprit très festif de cette ville : il s'y passe toujours quelque chose. En été, c'est le Film Festival qui projette des concerts, opéras et ballets sur un écran géant car ici la culture est toujours présente, pas comme un loisir élitiste mais comme une partie intégrante de la ville vivante et populaire. Ce n'est pas encore l'heure du programme principal sur le grand écran mais le programme pour enfant est projeté un peu plus loin. Installés dans l'herbe, nous regardons un ballet comique mettant en scène "Max und Moritz" deux personnages clownesques de la culture allemande. Les enfants apprécient. La musique et la danse les entraînent parfois à se poursuivre et se rouler dans l'herbe pendant un temps avant de revenir regarder le ballet.
Quand le film se termine, il est l'heure de dîner. La place est pleine de monde qui, installés sur des centaines de table, sirotent des prosecco et des bières en grignotant un morceau. Il y a au moins une dizaine de restaurants temporaires qui servent des plats à emporter. Nous mangeons des saucisses en buvant des bubble thés dans le soleil du soir. Puis je propose de rejoindre notre métro à Karlplatz par le tram. Ainsi nous pouvons longer le Ring en extérieur pour mon grand plaisir et admirer le Staatsoper avant de rentrer. Il faudra encore un peu de temps pour endormir les enfants tout exités après cette belle première journée.
La matinée du deuxième jour commence très tranquillement. On prend le petit déjeuner dans le hall de l'auberge sans se presser pendant que Seb va courir au jardin du Belvédère. Il est un peu plus de 11h quand nous prenons le métro pour rejoindre la station Praterstern. Là, nous passons un long moment dans une jolie aire de jeux avec une tyrolienne qui fait le bonheur des garçons. Puis nous nous dirigeons vers le programme principal de la journée : le Prater.
Cette fête foraine permanente illustre bien l'esprit festif et légèrement insouciant de la ville. Nous nous laissons facilement aller aux joies enfantines des attractions. Nous commençons par l'historique grande roue pour de nouveau admirer la ville vue d'en haut puis parcourons le parc en faisant tout ce qui nous fait envie : grand splash, bouées géantes, autos tamponneuses, chaises volantes, train fantôme et bornes d'arcade pour les enfants. Alors que la fin d'après-midi approche, nous commençons à être fatigués du bruit et de l'agitation du parc. Je propose de reprendre le métro jusqu'à Donauinsel. Nous longeons l'île vers le sud. Les viennois sont installés entre les bosquets au bord du fleuve sur des serviettes et se baignent dans le Danube avec parfois même des petits pontons aménagés. Nous avons pris des maillots et j'ai repéré une plage un peu plus loin qui sera plus pratique pour les enfants. Elle est sur l'autre rive : un petit renfoncement où du sable a été installé ce qui permet d'entrer dans l'eau et de barboter en ayant pied. L'enfant est aux anges. Le filleul ne se baigne pas mais joue dans je sable. Moi je nage plus loin sur le fleuve avec délice. C'est ce qu'on appelle le Neudonau. Le Danube coule des deux côté de l'île. Le bras Ouest est plus large, il y a un fort courant et c'est là que circulent les bateaux. Le bras Est, où nous sommes, est un lieu connu de baignade. L'autre possibilité est de rejoindre le Altedonau, un bras mort du Danube qui forme comme un lac.
Le soleil se couche et nous marchons tranquillement vers le métro. Nous arrivons dans un coin assez animé où bars et restaurants s'étalent le long des berges. Il y a même des trampolines sur le fleuve et les enfants ont visiblement encore l'énergie de sauter. Nous dînons dans un restaurant grec avant de reprendre le chemin de l'auberge. L'enfant s'endort presque dans le métro : la journée a été longue.
C'était notre dernier jour. Le lendemain matin, nous rangeons toutes nos affaires et reprenons nos bagages : en route pour Budapest.