Me voilà à la veille de mon départ d’Irlande…
Samedi matin à 7h30, je serai dans l’avion pour Helsinki, étape de mon périple vers la Corée. Petit retour sur ces deux années. Il y a presque deux ans j’arrivai à Dublin. Je ressentais, dans l’avion Ryanair décollant de Beauvais, la même excitation que celle qui m’étreint maintenant à l’idée de mon prochain départ. Sébastien m’avait précédé de quelques jours et il nous avait déjà trouvé un toit. Je faisais ma première expérience des bus dublinois et je traversais pour la première fois les rues de cette ville que j’allais apprendre à connaître. Il faisait très beau, et chaud, mon sac était lourd et ma robe pas pratique.
J’ai tout de suite apprécié la maison de Coolock. Bien sûr, je ne le savais pas encore, mais Coolock n’est pas le quartier le plus agréable de Dublin : excentré, industriel et un peu vide. Mais la maison en elle-même était agréable. Notre chambre en particulier, au dernier étage, éclairée par un velux avec vue sur le ciel. Le premier étage était occupé par Maria et Peter qui furent nos colocataires pendant 8 mois. J’ai revu Maria cette semaine dans cette même maison : elle savait que je partais et nous avait donc inviter à manger Sébastien et moi. Le jardin derrière la maison s’est transformé en jungle mais tout le reste semblait identique. En revoyant la cuisine aux senteurs espagnoles d’huile d’olive, je me suis rappelée toutes nos soirées durant cette première période : la soupe que je préparais à l’avance en regardant Friends, le sol glacé du rez-de-chaussée, le minuteur oublié sur le frigo… Maria quitte la maison mais pas l’Irlande : elle s’installe enfin avec son copain Phillip après moult ruptures et réconciliations dont nous avions été pendant un temps les témoins et conseillers. Peter s’apprête, lui, à partir pour Londres. Nous avions emménagé à la même date et bientôt aucun de nous ne vivra plus ici.
Notre premier mois en Irlande avait été euphorique. Nous ne savions pas à quoi nous attendre, nous étions prêts à aller distribuer le « Herald AM » sur O Connell Street le matin, ou ramasser les verres dans les pubs, même si, j’avoue, ce n’était pas notre priorité. Nous avons commencé par des cours d’anglais : premier contact plutôt agréable avec le pays. Cours le matin, après midi passés à visiter ou à se reposer. Prises de nos premières habitues culinaires avec le menu « Waffle de pomme de terre et œufs sur le plat » et pour le sandwich en ville, indispensable baggel. C’est à reculons que nous rentrons nous occuper de nos affaires en France début octobre.
Nous revenons plein d’entrain et d’énergie pour la partie la plus excitante mais aussi effrayante, la recherche d’un emploi et le début de notre « vrai » vie en Irlande. Sébastien, encore plus que moi, ne savait pas à quoi à s’attendre et aborde la recherche avec un esprit très ouvert. En moins d’une semaine, il trouve un emploi comme support technique chez HP, où il apprend en fait qu’il travaillera pour CPL et dans l’équipe Total. Drôle de reconversion après prof de français mais le boulot est beaucoup moins stressant.
Pour moi, c’est un peu plus compliqué : je voudrais travailler dans une boite de développement informatique mais je n’ai pas d’expérience. J’envoie mes CV à tout va sans jamais recevoir de réponses (chose très angoissante). Alors j’ouvre mon choix, je cherche aussi des postes dans l’accueil, je demande des stages… Je m’engage dans une association de recyclage d’ordinateur, Camara (engagement intense mais court…) et c’est là bas que je reçois « l’appel » : j’ai enfin un entretien. Toute stressée et bien habillée, je me rends à Swords, au milieu de nulle part, dans l’Aerside business parc. Une semaine après, (une semaine c’est long), j’envoie un mail et apprend, seule dans ma chambre à Coolock, que je suis prise : 3 mois, après on verra. C’est le début d’une histoire qui n’est toujours pas finie entre moi et ce que je découvrirai être une toute petite entreprise qui vend son « booking engine » à travers le monde. En deux ans, je suis passée de la jeune stagiaire à la développeuse chevronnée (il n’y a plus que 3 développeurs à Dublin alors…) et je vais même continuer à travailler depuis la France en « part time » et télé travail.
Le reste de l’année se déroule bien. Noël est douloureux car on le passe séparés, mais en janvier la bonne nouvelle tombe : Seb est pris chez Google. Mon boulot à moi aussi se passe bien et fin février j’obtiens un « vrai » contrat (entendez CDI). C’est le « rêve irlandais » qui se réalise, et on décide bientôt de démanger dans un appart à nous dans le centre ville. Ca rapprochera Seb et j’ai moi-même laisser tomber le douloureux bus 43 (attentes dans le froid de l’hiver) pour la gentille Mimi-cracra qui nous sert de voiture.
Il y a l’excitation de la recherche d’un logement, la promesse des visites à venir rendues possible par l’appartement 2 pièces, le printemps qui est magnifique. Et pourtant, le mois de mai passé, on rentre dans la période qui sera pour moi la plus difficile. Le magnifique printemps laisse la place à un été désastreux, vraiment le pire été que je n’ai jamais eu. Et puis, la première année se termine et la date à laquelle nous aurions dû rentrer arrive. J’ai accepté en février de rester un an de plus après que Sébastien ait été pris chez Google. Mais je commence à ressentir le « mal du pays » et même si j’apprécie mon boulot j’ai comme un sentiment de stagnation. Heureusement, les différentes visites pendant l’été puis le retour bref en France en septembre suivi du voyage en Espagne me donne la force d’affronter une seconde année.
L’automne commence par l’échec de ma candidature chez Google. Je m’en remets vite et maintenant que mon avenir est clair, j’organise le mieux possible mon année. Pour éviter de prendre 5 nouveaux kilos (c’était déjà trop tard pour les 5 premiers), je m’inscris dans une salle de sport avec piscine et prend la décision d’aller nager toutes les semaines. Dans la veine des activités, le groupe de théâtre Google commencé en été prend de l’ampleur et on parle de monter une pièce. Et pour continuer dans cet esprit, je m’inscris au deuxième trimestre à un cours de dessin. Tout ça plus rapidement la perspective du voyage en Corée et, bien sûr, de mon retour fait que l’année sera très agréable.
Maintenant, je pars, j’ai devant moi un mois en Corée, puis le retour en France. Il y aura bien sûr la douloureuse séparation d’avec Sébastien qui reste encore au moins quelques mois en Irlande. Mais bon, il a déjà pris ses billets pour rentrer sur Paris un week-end sur deux, et on survivra ! Je pense déjà à mon retour à l’université, à mon avenir entièrement ouvert. Je rentre avec un anglais courant, deux ans d’expérience significative et même un boulot. Je reprends la fac tout simplement car ça m’intéresse mais je reste libre et ait devant moi de nombreuses possibilités, en France, ou ailleurs…
Alors, adieu Irlande, adieu Dublin, adieu Penneys et Henry Street, adieu bagels, adieu Swords, adieu Café Kenya, adieu St Stephens’s Green et Grafton Street, adieu le temps qui change et les saisons qui n’existent pas, adieu enfants aux yeux torves du parc en face de chez moi, adieu tour bizarre, adieu Howth, Sutton et Malahide, adieu Mimi-cracra et conduite à gauche, adieu Irlande !
Mon seul regret : je n’ai pas vu les Cliffs of Mohers !