Vendredi, Sébastien travaille encore et part plus tôt que nous. En effet, nous restons à la maison car nous attendons l'ami de Roger qui doit nous louer une voiture. C'est un tunisien dont la femme est professeur de cuisine au lycée hôtelier et que Roger a rencontré par ce biais. Il dit nous faire un prix d'ami en nous louant la voiture à 70 dinars par jour, mais Roger lui dit qu'il a vu le prix chez Avis qui n'est que de 60 dinars par jour. L'homme est abasourdi et nous loue alors à 60 dinars en donnant diverses justifications sur le fait que la voiture est très bien, toute neuve, bien mieux que celles que l'on trouve à ce prix là chez Avis. Et que d'ailleurs les prix sont doublés en haute saison.
En conduisant, on se rend compte assez vite que la voiture n'est pas neuve du tout : elle a un feu stop cassé, une porte arrière à moitié bloquée, un réservoir et une jauge qui fonctionnent mal, et le lendemain, on découvrira qu'elle met au moins 10 minutes à bien vouloir démarrer. L'ami de Roger avait besoin d'argent et nous a pensé plus naïfs que nous le sommes. Roger a accepté de payer le prix tout en sachant que ça ne le valait pas, son ami avait sans doute besoin d'argent mais il n'a réfléchi que sur du court terme car on ne pourra pas le recommander aux autres touristes.
Enfin bon, nous avons une voiture ce qui est assez plaisant. Houmt Souk est situé sur la partie nord de l'île, à peu près au milieu. Nous allons d'abord vers l'ouest derrière l'aéroport où l'on trouve des petites criques sauvages et isolées. On visite là bas une petite mosquée donnant directement sur la mer, ses formes rondes et blanches se dessinant sur le bleu roi en un paysage abstrait et géométrique. De ce côté-ci la mer est calme comme un lac car nous sommes protégée par le continent.
Nos avons un peu brulé hier sur le bateau et nous nous méfions du soleil aujourd'hui. Nous ne restons donc pas sur la plage et préférons repartir vers l'est où nous espérons trouver un peu d'ombre. Nous traversons à nouveau Houmt Souk et partons vers la zone touristique. Les hôtels s'enchainent sur la côte est, les uns après les autres et certains touristes restent parqués là sans jamais voir autre chose. Nous rejoignons la plage qui reste tout de même accessible et gratuite à de nombreux endroits. Il n'y pas plus d'ombre que tout à l'heure mais après notre tour dans l'eau, nous restons sur la plage en se recouvrant de châles et vêtements.
Vers 13h, nous retournons à Houmt Souk où nous retrouvons Sébastien. Nous mangeons dans un petit bouge où le patron et le personnel ont tous une attitude pleine d'une morne lassitude, nos présences ne créant que quelques rares vagues sur leurs visages taciturnes. Ensuite, nous devons faire des courses car ce soir, nous avons invité le fameux ami à la voiture avec sa femme et ses enfants. Personne ne se sentant l'âme d'un grand cuisinier, nous ferons diverses salades et buffets et achetons fruits, légumes, fromage etc.
Après être repassés par l'appartement, nous repartons vers la plage. Le studieux Sébastien n'a en effet pas beaucoup profité de la baignade. Nous retournons près du café "La Rose" où nous étions allés le premier jour, à la limite de la zone touristique. Le ciel s'est couvert et je préfère rester sur la plage tandis que maman et Sébastien vont à l'eau. Roger n'y a trempé que le bout du pied, décidant rapidement que la température était un peu trop froide à son goût. Nous restons ensuite un peu sur le sable. Le soleil est certes caché mais le vent est doux et il ne fait pas froid. Puis maman retourne à la voiture pour s'habiller et alors que nous commençons à nous préparer, nous voilà attaqués de façon soudaine par un vent furieux. Il s'est levé d'un coup et nous balaie tel une tornade déchainée. Le sable tourbillonne autour de nous qui, agrippant nos affaires, clopinons les yeux fermés vers le refuge de la voiture. De retour à l'appartement, nous préparons le diner de ce soir : olives, salades, melons, riz aux oignons... La famille devait être là à 19h30, mais ils sont en retard et nous patientons dans le salon. Les voilà qui arrivent, la femme entre en premier avec les enfants tandis que le mari nous fait poireauter, pris dans une longue conversation téléphonique. La femme travaille comme professeur de cuisine au lycée hôtelier, c'est elle qui ramène un salaire fixe et qui assure la stabilité de la famille. C'est aussi elle qui s'occupe de tout à la maison : cuisine, ménage, pour tout le monde. Lui enchaine des plans plus ou moins foireux. Il a été guide pendant longtemps mais le métier ne le satisfaisait pas. Il a essayé de se lancer dans un centre de fitness mais ça n'a pas marché. A présent, il voudrait monter une affaire d'agence de voyage avec un ami tout en investissant dans l'immobilier. Il est en train de terminer une maison qu'il a acheté et qu'il espère louer ou revendre à prix d'or. Cependant, si tout est aussi mal foutu que sa voiture, il n'est pas tiré d'affaire. Il a une attitude un peu étrange avec nous, comme s'il était en représentation, qu'il avait quelque chose à prouver. Il me fait penser à un coq. Sa femme par contre, parait intelligente, stable et organisée. Ses trois enfants sont bien élevés : une fille et deux fils. La fille est la plus grande, elle est très douée à l'école, curieuse et agréable. Sa mère dit qu'elle ne sait pas faire la cuisine ou tout ce genre de chose mais que ça n'a pas d'importance : les études d'abord. Après le dîner, ils repartent, nous avons bien assuré notre rôle d'hôte même si la femme a été atterrée de voir Roger faire la cuisine et nous prend certainement pour des mégères !
Le lendemain, nous aurons encore la voiture et partirons faire le tour de l'île...