Films de l'été

Voilà un peu en retard (très en retard) les films que j'ai vus cet été : 8 films avant et après mon tour des Caraïbes !

Omar m'a tuer de Roschdy Zem

Il est toujours un peu dangereux de faire un film sur une affaire qui n'a en fait, jamais été élucidée. Ici, c'est véritablement un plaidoyer pour la cause de Omar Raddad bien fait et touchant et qui convainc certainement. Ce parti pris très partisan est finalement le seul reproche qu'on pourrait faire au film et qui, peut-être, nuit un peu à sa cause. En effet, on ne comprend tout simplement pas comment cet homme a pu être jugé coupable et surtout quels sont les arguments qui empêchent un nouveau procès. Sans doute est-ce aussi le cas du réalisateur qui a souhaité ici affirmer son point de vue : mais une vision un peu plus objective aurait, je pense, mieux payé. Pour l’aspect cinématographique, le film a de nombreuses qualité dont le jeu poignant de Sami Bouajila.

Une Séparation de Asghar Farhadi

Film iranien d'un réalisateur dont j'avais déjà vu l'excellent A Propos d'Elly. L'histoire commence assez doucement et prend de plus en plus de force au fur et à mesure du film. Les personnages sont bien dessinés et se développent dans toute leur complexité bien loin de clichés rapides. On comprend chacun d'entre eux sans en excuser aucun, c’est un drame fait de petites fautes, de la lutte de chacun pour que sa propre vie reste acceptable. La situation iranienne n'est pas vraiment le sujet mais elle apparait en filigrane, contexte de toute chose...

Il était une fois dans l'ouest de Sergio Leone

J'ai eu l'occasion d'aller voir ce classique qui passait en plein air à la ferme du buisson. Enveloppée dans ma couverture, installée sur mon transat, je peux frissonner au son de l'harmonica de Charles Branson. Malheureusement, la pluie malvenue nous force à interrompre la séance et à nous réfugier à l'intérieur. C’est un peu moins magique mais le film reste magnifique et nous nous laissons emporter...

My little Princess de Eva Ionesco

Dans ce film, la réalisatrice s'inspire de sa propre enfance pour nous raconter cette histoire de relation mère-fille à haute toxicité. Les deux actrices, la jeune Anamaria Vartolomei et Isabelle Huppert nous rendent parfaitement le rapport qui se joue, entre amour et haine. un questionnement sur le regard, l'art, la perversité...

 La Piel que Habito de Almodovar

On reste dans la perversion avec le dernier almodovar, La Piel que Habito. Nous voilà devant une magnifique oeuvre d'art : image parfaite, longs plans aux allures expressionnistes.  Il ne surpasse pas pour moi mon adoré Parle avec elle mais est certainement l'un des meilleurs films de l'année.

Tu seras mon fils de Gilles Legrand

C'est le premier film que je vois de ce réalisateur et je ne suis pas déçue ! Là encore, une relation parent-enfant assez toxique et qui s'envenime encore plus quand le père qui méprise son fils se trouve un nouveau rejeton. Le couple Niels Arestrup / Lorànt Deutch fonctionne parfaitement. J'ai particulièrement apprécié le jeu de ce dernier que son père met toujours dans une position de minable mais dont la force de caractère et la qualité reviennent dès que le paternel disparait. La question de la filiation est centrale, à travers le fils lésé, mais aussi à travers le personnage de Patrick Chesnais qui, au moment de mourir, voit son propre fils happé par celui qui fut son patron. Une légère teinte sociale et surtout l'univers très particulier du vignoble donnent à l'ensemble beaucoup de caractère. !

Les biens aimés de Christophe Honoré

Christophe Honoré a parfois des hauts et des bas, mais il s'impose comme un réalisateur incontournable et ce film peut être mis parmi ses hauts. Il commence très légèrement et l'on peut d'ailleurs lui reprocher un côté "carton pâte" dans sa description du passé et de façon encore plus flagrante dans la Tchécoslovaquie communiste, et ce, malgré la fraicheur de Ludivine Sagnier . Mais le film avance et s'empreint de plus de profondeur, voire de gravité, les personnages s'étoffent en particulier grâce au jeu de Catherine Deneuve qui est celle que je retiens le plus, entourée de ses deux maris...

  This Must be the place de Paolo Sorrentino

Sean Penn en Droopy-ex-star du rock, beau jeu d'acteur ! Un film presque surréaliste sur le road trip de ce personnage improbable à travers les Etats-Unis à la recherche d'un ancien nazi. L'ensemble est rendu très agréable par des personnages secondaires toujours justes et bien dessinés, comme la femme de Sean Penn, l'excellente Frances McDormand...

 

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Etrange Festival : Dead heads

  Mardi soir, nous voilà au rendez-vous pour notre 4eme séance à l’Étrange Festival. Fans de zombies, nous tentons Dead Heads film qui s'annonce déjanté dans la mouvance de Shaun of the Dead.

L'idée de base est intéressante : on se place du côté des zombies, deux d'entre eux semblent avoir conservé leur conscience humaine et tentent de se déplacer en cachant leur condition particulière et en échappant aux chasseurs de zombies. Les premières minutes du films sont assez engageantes dans le genre parodie en reprenant des grands classiques des films de zombies. La scène où les deux héros cherchent à s'enfuir d'un bar où ils sont coincés avec des humains se barricadant contre les vrais zombies est assez drôle. Malheureusement, les idées semblent très vite épuisées et les scénario s'embourbe dans des inepties.

Il aurait été plus intéressant que les deux personnages évoluent dans un monde apocalyptique, ce qui n'est pas le cas car ils s'échappent vite de la zone infectée. Ils sont ensuite continuellement poursuivis par une bande de chasseurs caricaturaux qui n'apportent rien au film. De façon générale, les personnages secondaires manquent grandement d’intérêt et l'histoire globale n'accroche pas vraiment. Par ailleurs, le zombiesque des deux héros n'est pas assez exploité à mon goût. A part leur aspect physique et la dégradation générale de leurs corps, ils sont complètement humain. Un petit instinct cannibale aurait été le bienvenue et aurait peut-être ajouté un peu de mordant au film. Car oui, avec les scènes qui avancent, tous les aspects un peu subversifs ou déviants qui font la qualité de ce genre de films sont abandonnés et on l'assiste en fait à une mièvre comédie romantique.

On remarque quelques bonnes idées cependant. Si le héros est assez fade, son acolyte zombie plus déjanté est une bonne trouvaille. Le zombie apprivoisé, assez classique, reste lui aussi amusant. Il aurait fallut plus de cet humour grinçant qui apparait parfois tandis qu'on nous sert des blagues lourdes et répétées qui ne font pas rire longtemps. En bref, c'est un essai raté et c’est bien dommage.

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Etrange Festival : The Oregonian

Pour notre troisième séance à l’Étrange Festival, nous allons voir le samedi soir The Oregonian. En nous le présentant, l'organisateur nous prévient tout de suite que ce n'est pas un film ordinaire et plutôt dans un genre expérimental. Et, en effet, on peut dire que The Oregonian a bien sa place au sein d'un festival qui met l'étrange à l'honneur et va pouvoir rentrer dans la liste des films les plus bizarres que j'ai vus (avec par exemple Rubber  ou Eraserhead).

On ne peut pas dire que je sois particulièrement fan des films psychédéliques et bien que je sois ouverte à l'expérimental, je juge souvent les séquences pseudo spirituelles vides et creuses. Mais j'ai été fascinée par The Oregonian et par la maîtrise du réalisateur. Le voyage étrange qu'il nous fait subir ne m'a pas du tout ennuyée et j'ai été touchée par l'univers qu'il arrive à créer. L'histoire se résume assez vite, ou plutôt, rien n'est vraiment racontable : une jeune femme s'enfuit de chez elle et se réveille après un accident de voiture. Ce sont les seuls faits concrets que l'on peut objectivement décrire et ils se déroulent lors des cinq premières minutes. Que se passe-t-il ensuite ? Je ne pense pas qu'il soit judicieux de chercher un sens ou une explication rationnelle à ce que l'on voit. Si on cherche vraiment à poser des mots, on peut toujours considérer l'ensemble du film comme un délire plus ou moins conscient marqué par la violence et la douleur vécue par le personnage principal.

Pourtant, on ne peut pas dire que The Oregonian n'ait aucun sens : le film a sa cohérence et son évolution propre. Plus on avance, et plus on quitte l'univers du réel pour rentrer dans ce qui se rapproche plus du rêve (ou du cauchemar) et de l'inconscient. Or je n'ai jamais vu un film reproduire avec tant de justesse l'univers absurde du rêve qui obéit à sa propre logique et ses propres obsessions. On avance dans le temps et l'espace d'une façon non linéaire, de scènes en scènes, chaque univers ayant sa propre personnalité marquée de récurrences inquiétantes et qui évolue presque toujours vers une angoisse pleinement ressentie par le spectateur. Des flashbacks nous donnent un lien très ténu à vers la réalité, laissant un soupçon d'explications de cet inconscient qui n'est pas le nôtre. La violence est présente, comme tapie dans l'ombre, partout suggérée. Un long cauchemar donc mais auquel on peut prendre un plaisir certain en tant que spectateur, et ce surtout si on est prêt à accepter de quitter l’univers rassurant  d'une histoire conventionnelle pour aller vers cet "unkwown", vers l'absurdité de l'esprit et de l'image.

D'un point de vue technique, le travail du son, du montage, la précision de chaque plan nous offrent un premier film très maitrisé et nous découvrent un réalisateur de talent. Les scènes rappellent parfois Lynch dans ce qu'il a fait de plus obscur mais aussi de meilleur. Comme vous avez pu en juger, j'ai beaucoup aimé ce film mais je ne le conseillerais qu'à un certain type de public. Un public qui est prêt à aller chercher dans un film autre chose que ce qui est habituellement offert (et qui peut en outre  être très agréable) et à apprécier une œuvre d'art au delà des conventions. Par ailleurs, je ne peux pas critiquer ceux que cet univers aura laissé froids et qui, perdus par le manque de sens, se seront simplement ennuyés. On est vraiment à la limite entre le film tel qu'on le conçoit au cinéma et la performance artistique : je n'infligerais pas ça à tout le monde. Cependant, je pense que le réalisateur, Calvin Lee  Reeder, est à retenir. Il évoluera peut-être vers des oeuvres qui auront plus leur place au musée qu'au cinéma mais pourrait aussi réussir à adapter son style très particulier à une histoire plus conventionnelle et par là accessible à un plus large public, ce qu'a fait Lynch par exemple. En attendant, pour les curieux et les amateurs, le film est encore projeté pour le festival samedi et dimanche prochain (10 et 11 septembre) : profitez-en car je ne pense pas qu'il y aura beaucoup d'autres occasions !

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