La transition est brutale. Le matin, nous quittions les cailloux solitaires de Tecopa, et, en quelques heures, nous voilà dans la foule climatisée du Louxor. Une ville absurde poussée au milieu du désert : Las Vegas. De notre chambre, nous pourrons voir derrière la ville la plaine poussiéreuse, les montagnes desséchées que nous venons de quitter. Mais pour l'instant, nous n'avons pas de chambre. Il est encore trop tôt et, au comptoir où se pressent des dizaines de touristes, on nous a dit qu'il faudrait attendre. Nous sommes un peu hébétés, un peu perdus. Nous voilà plongés dans ce qui ressemble à un étrange parc d'attraction plein de bruits, de gens et de machines à sous. L'hôtel est une ville en soi, mais pas une ville particulièrement agréable. Il fait sombre, la lumière n'est qu'artificielle, le jour et son soleil ardent sont cachés. Nous avons choisi le Louxor, comme on aurait choisi n'importe quel autre, en se disant qu'il serait amusant de loger dans un de ces palaces-casinos-kitch-extravagants. Extravagant, ça c'est sûr, dans un décor en toc qui rappelle Disneyland. L'hôtel a une forme de pyramide avec un immense Sphinx à l'entrée. Les chambres sont placées le long des parois, ce qui explique qu'on ne voit pas le soleil. Vu la forme pyramidale, les ascenseurs doivent grimper en oblique : étrange et absurde prouesse architecturale. L'intérieur de la pyramide est creux, organisé en deux étages avec restaurants, bars, salles de spectacle et évidemment, plein de machines à sous. Il faut marcher cinq bonnes minutes entre l'entrée arrière par le parking et le « check-in desk » de l'autre côté. Nous errons tels des fantômes, il faudrait qu'on mange mais la nourriture ne me fait pas envie. Finalement, on trouve le « buffet restaurant » au sous sol. Au moins, on peut s'asseoir dans un coin de table pas trop bruyant et attendre que ça passe. Il y a tout un comptoir de salades plutôt correctes et quelques desserts qui éveillent à nouveau mon appétit.
Enfin, nous récupérons notre chambre. On peut se reposer dans le doux vrombissement de la climatisation et admirer les meubles décorés de faux hiéroglyphes. Au moins, on est coupés un moment de l'agitation permanente de l'extérieur. On ne ressort que le soir pour aller se promener sur le Strip. Le Strip, c'est cette récente avenue de Las Vegas devenue son attraction principale : une succession d'hôtels-casinos géants. Las Vegas est bien la seule ville où l'on vient visiter les hôtels. Une ville faite uniquement d'hôtels où la seule chose à voir, ce sont les hôtels : l'auto-suffisance touristique... C'est sur le Strip que l'on trouve les fameux Caesar Palace ou New York New York ou encore la fausse Tour Eiffel. Tout est faux, tout est toc, tout est beaucoup trop grand, tout est faussement chic, tout est écœurant, tout est creux. C'est l'impression la plus forte : le vide derrière la foule, tout ça n'est qu'un désert recouvert de carton-pâte. L'avenue continue sur des kilomètres, très large, entourée de voix piétonnes où les touristes déambulent, montant et descendant sans arrêt les multiples passerelles qui permettent de traverser les voix auxiliaires. C'est un univers faussement paradisiaque : fontaines, lacs, végétation... Une espèce de monde artificiel et utopique qui ne me met pas du tout à l'aise. Je pensais trouver quelque chose d'un peu dissonant, d'un peu dérangeant à Las Vegas, mais au contraire, le Strip est ultra clean, comme javellisé. Le seul rappel de la réalité, ce sont les nombreux SDF posés au pied des palaces comme de gros sacs encombrants. J'ai l'étrange impression qu'ils seront bientôt nettoyés eux aussi. Les prostituées ont déjà été repoussées ailleurs, hors de la vue des familles qui déambulent en tong le long de l'avenue. On ne trouve que quelques jolies jeunes femmes, très « clean », en tenue légèrement affriolante, qui se font prendre en photo pour quelques dollars. Sur le bord de la rue, quelques hommes ou femmes au visage triste et discret, qu'on pourrait prendre pour des agents d'entretien, glissent subrepticement dans les mains des hommes des cartes avec des filles beaucoup moins « clean » et des numéros de téléphone.
Les machines à sous, les jeux d'argent ne revêtent plus l'aspect subversifs qu'ils ont eu jadis. J'ai l'impression de marcher dans un immense centre commercial. Entre deux casinos, on trouve une boutique Vuitton. Tout est une immense machine à dépenser de l'argent, et en échange, on reçoit des paillettes, du vide. La machine à sous n'en est que le paroxysme : on met des dollars et des dollars et on appuie sur des boutons colorés. Les gens jouent-ils même pour gagner ? Certains oui, et certains deviennent accros. Une des images les plus pathétiques de Las Vegas : ces obèses qui peuvent à peine marcher et se déplacent en petite voiturette. Installés devant des machines, ils appuient et appuient encore sur les boutons, hypnotisés. On parle souvent de Vegas comme de cet endroit si « extravagant » qu'il faut avoir vu au moins une fois. Certains apprécient et rient de cet univers, d'autres s'y amusent même vraiment, goûtant ce luxe artificiel. Moi, je trouve cet endroit effrayant, comme un miroir (à peine) déformant de la société de consommation. J'éprouve très fortement le désir de m'enfuir. La plupart du temps, je ressens juste l’écœurement. Partout, des affiches pour des spectacles « époustouflants », je n'ai envie d'en voir aucun. Partout des restaurants, j'ai du mal à trouver quelque chose que je veux manger. Partout des boutiques, je ne veux rien acheter. Je dirai à Seb le lendemain : « tous ces gens, ce bruit, cette lumière, cette bouffe : je trouve ça dégoûtant ». Il y a tout de même quelques images absurdes et amusantes, comme ces « born again christian » qui crient dans des mégaphones « Repent from your sin » avec des panneaux « Come back to Jesus ». Un couple de Lesbienne se prend en photo en s'embrassant devant eux.
Le jour suivant, nous passons la journée cachés dans la chambre, « à l'abris ». L'hôtel est globalement une déception. A part le bling-bling, il n'a rien de luxueux. C'est une vraie usine, j'ai l'impression de dormir dans un aéroport (d'ailleurs, on voit les avions depuis la chambre). Tout est compliqué, dès qu'on veut faire le moindre truc (par exemple prendre le petit déjeuner), on se retrouve plongé dans le bruit et la foule, c'est fatigant. La piscine est une blague. Elle avait l'air grande mais vu la taille de l'hôtel, elle est surtout pleine. Impossible de nager car elle ne fait pas plus d'un mètre de profondeur : c'est une grande flaque d'eau qui sent le chlore. Heureusement, on a la chance de trouver les rares places à l'ombre (sinon, il faut payer le supplément parasol pour ne pas cramer) et donc on peut faire passer le temps en lisant nos bouquins malgré la musique tonitruante. Au retour du Grand Canyon, on devra passer encore une nuit à Vegas. Cette fois, on se tiendra éloignés du Strip et des ses palaces, on choisit un hôtel à l'écart avec comme critère principal : qu'il ne fasse PAS casino. Ce sera beaucoup plus agréable.
En fin d'après-midi, on sort laver notre linge (après une semaine de camping), il faut quitter l'hôtel qui ne propose qu'un service hors de prix. En roulant 5 minutes, on découvre un autre aspect de Vegas : le côté ville de banlieue américaine ordinaire (assez moche et ennuyeuse) mais où l'on trouve des machines à sous dans des endroits saugrenus, comme le super-marché. Et là encore, dans les boui-bouis cradocs qui entourent la laverie, des accros qui appuient frénétiquement sur les boutons. Puis on roule encore, vers un autre coin de la ville qu'on n'a pas vu, le « downton ». C'est le « vieux » Vegas, celui qui existait avant le Strip. Il se compose principalement d'une rue, elle aussi pleine d'hôtels et de casinos mais de taille un peu plus convenable. Sous les néons qui clignotent, on peut s'imaginer qu'on retrouve le Vegas d'Elvis Presley, d'ailleurs ses sosies chantent un peu partout. De façon générale, cette partie là de la ville est un peu plus anarchique que le Strip aseptisé. On trouve divers hurluberlus en costumes extravagants ou proposant des mini spectacles plus ou moins amusant. C'est aussi moins « clean ». Dans tous les casinos, les Strip-teaseuses se déhanchent voluptueusement (en restant quand même en sous-vêtements mais certaines affiches promettent plus dans les « gentelman's club »). Au final, ces filles qui dansent me dérangent bien moins que l'ambiance proprette et commerciale du Strip. Ici, les boutiques Vuitton ont laissé la place aux bazars « tout à un 1 dollar ». Et puis au moins, les Strip-teaseuses ne sont pas photoshopées, ce sont de vraies jeunes femmes avec une variété de corps qui a disparu depuis longtemps des panneaux publicitaires.
Nous nous amusons dans les casinos à l'ambiance légèrement rétro. Il me semble qu'au niveau jeu d'argent, c'est ici que es choses sérieuses se passent plus que sur le touristique Strip. Enfin bon, les machines de base sont ennuyeuses partout. La roulette ou le black jack sont plus amusants, surtout ce dernier mais je ne le maîtrise pas assez. (D'un autre côté, quand on le maîtrise assez bien pour compter les cartes et gagner vraiment, on se fait jeter vite fait du casino). On peut y jouer (ainsi qu'à la roulette) sur des machines électroniques ce que nous faisons un peu. Puis nous voulons tester les « vraies » tables avec les jetons mais déchantons rapidement. La mise de base est de 10 dollars. Deux fois de suite, un nombre noir sort alors que nous avons misé rouge et nous perdons 20 dollars et notre envie de jouer. Je regarde avec étonnement ces joueurs qui placent presque amoureusement leurs jetons sur les différents numéros, suivant une logique qu'eux seuls peuvent comprendre (franchement, à la roulette, les stratégies gagnantes, ça n'existe pas). Le Downton se parcourt beaucoup plus rapidement que le Strip, nous rentrons assez tôt. J'apprécie un peu plus mais je ne peux m'empêcher de penser que c'est ce qui a donné naissance au reste, comme une légère grosseur qui se serait transformée en immonde tumeur... Nous retournons vers l'hôtel. Le long de l'autoroute, les « clubs » se succèdent loin de la foule, cachant les vraies strip-teaseuses et maisons de passe. A Vegas comme ailleurs, l'hypocrisie est reine, cachant dans ses coins sombres ce que les gentilles familles ne veulent pas voir.
Voilà qui conclut mon expérience ici. Je quitte ce lieu sans la moindre envie d'y retourner. Je me demande seulement si un jour tout ça ne va s'écrouler sur son décor vide, retourner au désert. Serai-je là pour le voir ?
La transition est brutale. Le matin, nous quittions les cailloux solitaires de Tecopa, et, en quelques heures, nous voilà dans la foule climatisée du Louxor. Une ville absurde poussée au milieu du désert : Las Vegas. De notre chambre, nous pourrons voir derrière la ville la plaine poussiéreuse, les montagnes desséchées que nous venons de quitter. Mais pour l'instant, nous n'avons pas de chambre. Il est encore trop tôt et, au comptoir où se pressent des dizaines de touristes, on nous a dit qu'il faudrait attendre. Nous sommes un peu hébétés, un peu perdus. Nous voilà plongés dans ce qui ressemble à un étrange parc d'attraction plein de bruits, de gens et de machines à sous. L'hôtel est une ville en soi, mais pas une ville particulièrement agréable. Il fait sombre, la lumière n'est qu'artificielle, le jour et son soleil ardent sont cachés. Nous avons choisi le Louxor, comme on aurait choisi n'importe quel autre, en se disant qu'il serait amusant de loger dans un de ces palaces-casinos-kitch-extravagants. Extravagant, ça c'est sûr, dans un décor en toc qui rappelle Disneyland. L'hôtel a une forme de pyramide avec un immense Sphinx à l'entrée. Les chambres sont placées le long des parois, ce qui explique qu'on ne voit pas le soleil. Vu la forme pyramidale, les ascenseurs doivent grimper en oblique : étrange et absurde prouesse architecturale. L'intérieur de la pyramide est creux, organisé en deux étages avec restaurants, bars, salles de spectacle et évidemment, plein de machines à sous. Il faut marcher cinq bonnes minutes entre l'entrée arrière par le parking et le « check-in desk » de l'autre côté. Nous errons tels des fantômes, il faudrait qu'on mange mais la nourriture ne me fait pas envie. Finalement, on trouve le « buffet restaurant » au sous sol. Au moins, on peut s'asseoir dans un coin de table pas trop bruyant et attendre que ça passe. Il y a tout un comptoir de salades plutôt correctes et quelques desserts qui éveillent à nouveau mon appétit.
Enfin, nous récupérons notre chambre. On peut se reposer dans le doux vrombissement de la climatisation et admirer les meubles décorés de faux hiéroglyphes. Au moins, on est coupés un moment de l'agitation permanente de l'extérieur. On ne ressort que le soir pour aller se promener sur le Strip. Le Strip, c'est cette récente avenue de Las Vegas devenue son attraction principale : une succession d'hôtels-casinos géants. Las Vegas est bien la seule ville où l'on vient visiter les hôtels. Une ville faite uniquement d'hôtels où la seule chose à voir, ce sont les hôtels : l'auto-suffisance touristique... C'est sur le Strip que l'on trouve les fameux Caesar Palace ou New York New York ou encore la fausse Tour Eiffel. Tout est faux, tout est toc, tout est beaucoup trop grand, tout est faussement chic, tout est écœurant, tout est creux. C'est l'impression la plus forte : le vide derrière la foule, tout ça n'est qu'un désert recouvert de carton-pâte. L'avenue continue sur des kilomètres, très large, entourée de voix piétonnes où les touristes déambulent, montant et descendant sans arrêt les multiples passerelles qui permettent de traverser les voix auxiliaires. C'est un univers faussement paradisiaque : fontaines, lacs, végétation... Une espèce de monde artificiel et utopique qui ne me met pas du tout à l'aise. Je pensais trouver quelque chose d'un peu dissonant, d'un peu dérangeant à Las Vegas, mais au contraire, le Strip est ultra clean, comme javellisé. Le seul rappel de la réalité, ce sont les nombreux SDF posés au pied des palaces comme de gros sacs encombrants. J'ai l'étrange impression qu'ils seront bientôt nettoyés eux aussi. Les prostituées ont déjà été repoussées ailleurs, hors de la vue des familles qui déambulent en tong le long de l'avenue. On ne trouve que quelques jolies jeunes femmes, très « clean », en tenue légèrement affriolante, qui se font prendre en photo pour quelques dollars. Sur le bord de la rue, quelques hommes ou femmes au visage triste et discret, qu'on pourrait prendre pour des agents d'entretien, glissent subrepticement dans les mains des hommes des cartes avec des filles beaucoup moins « clean » et des numéros de téléphone.
Les machines à sous, les jeux d'argent ne revêtent plus l'aspect subversifs qu'ils ont eu jadis. J'ai l'impression de marcher dans un immense centre commercial. Entre deux casinos, on trouve une boutique Vuitton. Tout est une immense machine à dépenser de l'argent, et en échange, on reçoit des paillettes, du vide. La machine à sous n'en est que le paroxysme : on met des dollars et des dollars et on appuie sur des boutons colorés. Les gens jouent-ils même pour gagner ? Certains oui, et certains deviennent accros. Une des images les plus pathétiques de Las Vegas : ces obèses qui peuvent à peine marcher et se déplacent en petite voiturette. Installés devant des machines, ils appuient et appuient encore sur les boutons, hypnotisés. On parle souvent de Vegas comme de cet endroit si « extravagant » qu'il faut avoir vu au moins une fois. Certains apprécient et rient de cet univers, d'autres s'y amusent même vraiment, goûtant ce luxe artificiel. Moi, je trouve cet endroit effrayant, comme un miroir (à peine) déformant de la société de consommation. J'éprouve très fortement le désir de m'enfuir. La plupart du temps, je ressens juste l’écœurement. Partout, des affiches pour des spectacles « époustouflants », je n'ai envie d'en voir aucun. Partout des restaurants, j'ai du mal à trouver quelque chose que je veux manger. Partout des boutiques, je ne veux rien acheter. Je dirai à Seb le lendemain : « tous ces gens, ce bruit, cette lumière, cette bouffe : je trouve ça dégoûtant ». Il y a tout de même quelques images absurdes et amusantes, comme ces « born again christian » qui crient dans des mégaphones « Repent from your sin » avec des panneaux « Come back to Jesus ». Un couple de Lesbienne se prend en photo en s'embrassant devant eux.
Le jour suivant, nous passons la journée cachés dans la chambre, « à l'abris ». L'hôtel est globalement une déception. A part le bling-bling, il n'a rien de luxueux. C'est une vraie usine, j'ai l'impression de dormir dans un aéroport (d'ailleurs, on voit les avions depuis la chambre). Tout est compliqué, dès qu'on veut faire le moindre truc (par exemple prendre le petit déjeuner), on se retrouve plongé dans le bruit et la foule, c'est fatigant. La piscine est une blague. Elle avait l'air grande mais vu la taille de l'hôtel, elle est surtout pleine. Impossible de nager car elle ne fait pas plus d'un mètre de profondeur : c'est une grande flaque d'eau qui sent le chlore. Heureusement, on a la chance de trouver les rares places à l'ombre (sinon, il faut payer le supplément parasol pour ne pas cramer) et donc on peut faire passer le temps en lisant nos bouquins malgré la musique tonitruante. Au retour du Grand Canyon, on devra passer encore une nuit à Vegas. Cette fois, on se tiendra éloignés du Strip et des ses palaces, on choisit un hôtel à l'écart avec comme critère principal : qu'il ne fasse PAS casino. Ce sera beaucoup plus agréable.
En fin d'après-midi, on sort laver notre linge (après une semaine de camping), il faut quitter l'hôtel qui ne propose qu'un service hors de prix. En roulant 5 minutes, on découvre un autre aspect de Vegas : le côté ville de banlieue américaine ordinaire (assez moche et ennuyeuse) mais où l'on trouve des machines à sous dans des endroits saugrenus, comme le super-marché. Et là encore, dans les boui-bouis cradocs qui entourent la laverie, des accros qui appuient frénétiquement sur les boutons. Puis on roule encore, vers un autre coin de la ville qu'on n'a pas vu, le « downton ». C'est le « vieux » Vegas, celui qui existait avant le Strip. Il se compose principalement d'une rue, elle aussi pleine d'hôtels et de casinos mais de taille un peu plus convenable. Sous les néons qui clignotent, on peut s'imaginer qu'on retrouve le Vegas d'Elvis Presley, d'ailleurs ses sosies chantent un peu partout. De façon générale, cette partie là de la ville est un peu plus anarchique que le Strip aseptisé. On trouve divers hurluberlus en costumes extravagants ou proposant des mini spectacles plus ou moins amusant. C'est aussi moins « clean ». Dans tous les casinos, les Strip-teaseuses se déhanchent voluptueusement (en restant quand même en sous-vêtements mais certaines affiches promettent plus dans les « gentelman's club »). Au final, ces filles qui dansent me dérangent bien moins que l'ambiance proprette et commerciale du Strip. Ici, les boutiques Vuitton ont laissé la place aux bazars « tout à un 1 dollar ». Et puis au moins, les Strip-teaseuses ne sont pas photoshopées, ce sont de vraies jeunes femmes avec une variété de corps qui a disparu depuis longtemps des panneaux publicitaires.
Nous nous amusons dans les casinos à l'ambiance légèrement rétro. Il me semble qu'au niveau jeu d'argent, c'est ici que es choses sérieuses se passent plus que sur le touristique Strip. Enfin bon, les machines de base sont ennuyeuses partout. La roulette ou le black jack sont plus amusants, surtout ce dernier mais je ne le maîtrise pas assez. (D'un autre côté, quand on le maîtrise assez bien pour compter les cartes et gagner vraiment, on se fait jeter vite fait du casino). On peut y jouer (ainsi qu'à la roulette) sur des machines électroniques ce que nous faisons un peu. Puis nous voulons tester les « vraies » tables avec les jetons mais déchantons rapidement. La mise de base est de 10 dollars. Deux fois de suite, un nombre noir sort alors que nous avons misé rouge et nous perdons 20 dollars et notre envie de jouer. Je regarde avec étonnement ces joueurs qui placent presque amoureusement leurs jetons sur les différents numéros, suivant une logique qu'eux seuls peuvent comprendre (franchement, à la roulette, les stratégies gagnantes, ça n'existe pas). Le Downton se parcourt beaucoup plus rapidement que le Strip, nous rentrons assez tôt. J'apprécie un peu plus mais je ne peux m'empêcher de penser que c'est ce qui a donné naissance au reste, comme une légère grosseur qui se serait transformée en immonde tumeur... Nous retournons vers l'hôtel. Le long de l'autoroute, les « clubs » se succèdent loin de la foule, cachant les vraies strip-teaseuses et maisons de passe. A Vegas comme ailleurs, l'hypocrisie est reine, cachant dans ses coins sombres ce que les gentilles familles ne veulent pas voir.
Voilà qui conclut mon expérience ici. Je quitte ce lieu sans la moindre envie d'y retourner. Je me demande seulement si un jour tout ça ne va s'écrouler sur son décor vide, retourner au désert. Serai-je là pour le voir ?